lundi 28 avril 2008

Un loukoum salvateur, du bon au Passage de Senderens, du ??! dans la bulle de Thierry Marx, et des recettes passardiennes

Menu du jour

Bla bla poêlé et sa mousseline de nature du marché
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Do : Le Passage de Senderens
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Don’t : Dans la sphère de Thierry Marx
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Farandole de recettes inspirées

Ça a commencé comme ça : un appel m’informant que « quelque chose » empestait dans ma boîte aux lettres, une injonction de rentrer illico et de m’occuper de cette affaire. On me précise que l’enveloppe vient de Strasbourg. Mon sang n’a fait qu’un tour – en même temps, deux ça me semble assez dangereux pour la santé. Il ne m’en fallait pas plus pour me ruer dans le métro – gracieusement quand même – et découvrir ce que j’avais supposé : non, ça pue pas, c’est de l’ail des ours ! Mon loukoum favori a encore frappé en m’envoyant une enveloppe pleine de cette herbe géniale et magnifiquement odorante – mais les voisins ne sont peut-être pas du même avis – que je ne parvenais pas à trouver à la capitale. L’étincelle qui m’a sortie d’un risque de torpeur avéré. Précisons au passage que cette histoire de puanteur supposée aura coûté la vie à plusieurs bananes innocentes, accusées à tort d’être l’origine de la délicate effluve – vraiment, maman, il faut que t’arrêtes Patrick Roger, ça te détruit les sens.

Dans un quotidien de bureau un poil morose depuis que mon co-pakistanais m’a lâchement quittée pour des horizons plus burger-frittesques, rien n’était plus pareil : plus personne pour partager discrètement les restes des assortiments pâtissiers mdd réservés aux clients, plus d’épaule amie pour pleurer au désespoir de l’assurance vie, plus d’oreille pour écouter – ou pas – ma logorrhée enthousiasmante sur la portée de la révolution du gastrovac. Bref, l’heure n’était pas à la fête des sens, et je pressentais distinctement une menace de fuite de l’inspiration culinaire.
Et puis on peut même plus compter sur notre petit Président pour nous sortir une bonne blague de derrière la Rolex depuis qu’il s’est mis en mode « allez les mecs, on voit ce que ça donne si on se la joue costard spartiate ».
Et puis y a plus de saison.
L’angoisse, quoi.
C’était sans compter sur l’arrivée de ladite enveloppe, qui me réveilla instantanément l’esprit - et les narines. Une partie s’est ainsi retrouvée au congel – depuis que je côtoie intimement l’assurance vie, je prévois l’avenir, le reste a été préparé en sorte de succulent pesto à savourer en mode tartine, salade ou pâtes. (de l'ail des ours, de la poudre d'amande, du parmesan, de l'huile d'olive, sel/poivre, au feeling, et un petit coup de mixeur)
L’ail des ours, c’est une franche bouchée de nature qui débarque soudain et qui donne envie d’aller voir là bas si j’y suis, par exemple loin au soleil. Il se trouve que, non, visiblement, c’est pas possible là tout de suite. Qu’importe, une journée aux allures d’été fera l’affaire, tellement bien d’ailleurs que je me suis complètement laissée avoir par cette jolie petite robe à 3 chiffres tout à fait nécessaire pour attraper mon premier quasi coup de soleil de l’année (note pour plus tard : penser à passer un coup de fil à Suzanne la banquière, pour lui expliquer la chose).
De l’ail des ours, une paire de lunettes de soleil sortie de son désespoir, il n’en fallait pas plus pour me redonner l’envie d’avoir envie de cuisiner. Une fois l’envie arrivée, c’est tout naturellement que j’ai ressorti les recettes d’une autre de mes idoles.

Il y a peu de temps, j’ai fait l’expérience d’une émotion gustative inédite : la submersion lacrymale. C’est en goûtant le point d’orgue de cet inoubliable repas dont je n’ai pas parlé que l’événement arriva : un macaron chocolat-topinambour qui me fit littéralement pleurer de plaisir (je me soigne, un peu). (note pour plus tard : parler de ces repas dont on ne peut pas parler) Bref, c’était à l’Arpège, où je découvris la cuisine amoureuse d’Alain Passard.

Je me suis donc lancée dans la préparation d’un repas tout en fruits et légumes et ai retrouvé la joie de passer une journée barricadée dans ma cuisine.
Ça commence avec une crème d’asperges vertes mi-cuites au basilic et à la cardamome de mon invention, accompagnée d’une glace à la fameuse moutarde d’Orléans Martin Pouret – d’une onctuosité et d’une saveur à se damner, ou en tout cas à aller à l’autre bout de Paris.

Place ensuite au gratin d’oignons doux au Parmesan et au poivre noir de Monsieur Passard, d’une simplicité enfantine et d’un bonheur divin. Les petits oignons confits dans le beurre salé ayant perdu tout le piquant pour ne garder que le parfum, le croquant du parmesan, ces milliers d’odeurs qui envahissent la pièce

En dessert, un autre incontournable du chef, la tomate confite aux douze saveurs, que j’ai accompagné d’une crème infusée au thym dont je suis assez contente.

Je ne sais pas si le meilleur a été de préparer ou de goûter, mais la minutieuse préparation de cette recette illustre parfaitement la phrase de Passard : « j’ai envie de faire régner une douce lenteur autour de moi ». Il faut du temps, le temps que tous ces arômes se dégagent, se mêlent et parfument la cuisine d’épices et de fruits, jusqu’à former un tout cohérent et équilibré.
La dernière recette du repas est arrivée au dernier moment, un peu en réaction à la meeeeerveilleuse exposition sur Thierry Marx (cf. mes notes gentiment sarcastiques plus bas) qui me fait dire qu’en matière de moléculaire, j’en resterai aux passionnants travaux de réflexion de This et de Gagnaire, parce que je ne pense pas que l’idée de l’écume de citron à la lécithine de soja soit une fin en soi – du goût !

Hervé This : « une mousse est une dispersion de bulles d’air dans un liquide (pour les mousses liquides) ; si le liquide gélifie, une fois la mousse formée, la mousse liquide devient une mousse solide, parce que les bulles d’air sont alors prisonnières du gel, lequel est une dispersion d’un liquide dans un solide. » D’où la réponse culinaire de Gagnaire : mousse gélifiée d’agrumes (j’ai utilisé ce que j’avais sous la main : de l’orange, du citron jaune, du yuzu et du sudachi, citron vert japonais). Une texture de gelée à bulles assez géniale et parfaitement en accord avec le mélange de saveurs acidulées : adopté (mais pour la prochaine fois, plutôt en petite quantité en accompagnement).

Merci encore à Loukoum pour ce sursaut bienfaiteur.

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Bla bla bla … A part ça, j’ai décidé de m’essayer de nouveau au jeu délicat de la critique de restaurant en allant dîner au Passage de Senderens, qui a semble-t-il bien fait de laisser tomber la lourdeur des rituels et d’ouvrir sa cuisine au plus grand nombre – enfin, on se comprend.

On pourrait y entrer par la grande porte opaque, annonciatrice d’un luxe discret, celle qu’on remarque pourtant à peine sur la belle place de la Madeleine. A l’exact opposé du clinquant pailleté et cosmétique, la maison joue la modestie avec sa façade solennelle abritant les boiseries Majorelle mâtinées d’un décor de designer (Patrick Jouin, grand colaborateur de Ducasse), où une toute autre lumière dorée donne le la.
On pourrait, mais à la grande salle on préférera emprunter le passage, sonner, avant de gravir le petit escalier. Là, ce ne sont pas des dorures de pacotille, mais une atmosphère ambrée qui nous invitent à prendre place sur les banquettes et les confortables fauteuils, au milieu d’une clientèle d’habitués.
Ici, pas de paillettes, pas de déstructuration, mais du bon et du beau au naturel, dans un désordre savamment organisé.

Asperges vertes et oeuf de poule mollet, crème d'asperge

Les asperges et l’œuf de poule mollet, qui se côtoyaient en silence dans l’assiette, se lancent dans un joyeux bavardage lorsque le jaune jaillit et se jette goulûment sur le croquant des tiges vertes. Plus tard, la douce et moelleuse volaille se frotte à l’acidité saisissante de la crème au citron tandis que les aubergines confites fondent et disparaissent sur le palais.


Volaille de Challans "tomate, citron et basilic", aubergines confites

Pas de chemin de traverse, pas de fioritures douteuses, les saveurs vont droit au but, droit au palais.

Canard croisé, rougail de poireaux et mangues

Tartare de veau de lait et langoustine, vermicelle de riz, parmigiano reggiano

Le plaisir de la maîtrise était là, douceur et acidité au milieu de cuissons irréprochables, l’extase arrive avec le fromage et le dessert, tous deux devenus classiques incontournables de la carte depuis leur création il y a quelques années déjà, par un chef pâtissier de renommée internationale alors encore frais et pimpant.
Une fourme d’Ambert piquante et crémeuse, une brioche épicée toastée aux cerises Amarena, un verre de Porto Rozès vintage 2000, des accords détonants, on touche à la béatitude.

Fourme d'Ambert, brioche épicée toastée aux cerises Amarena

Ce serait oublier de rendre honneur au véritable dessert, disque parfait d’une ganache explosive, le coulant de Samana millésimé 2006, pur cacao de Saint-Domingue. Un chocolat pur et puissant, simplement sublimé par une ganache servie juste tiède, dont l’insaisissable surface laisse émerger une onde d’onctuosité, une expérience érotique intense et diffuse de premier ordre.

Coulant de Samana millésimé 2006, pur cacao de Saint-Domingue

Dans les assiettes de Monsieur Senderens - et de son chef Jérôme Banctel, ça chante, ça discute, ça parle de savantes évidences. Et on se dit simplement que le perfectionnisme obstiné a du bon, du très bon, surtout quand on n’est pas à la place du chef.

Menu du jour à 36 euros, sensiblement pareil à la carte
Un des autres points forts est le principe des petites portions, qui permet au palais et à l’estomac d’arriver au dessert encore alertes et réceptifs (petites portions qui équivalent d'ailleurs aux portions "normales" de nombre de tables)

Le Passage - Senderens
9, place de la Madeleine
Paris, 8ème
01 42 65 22 90

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Quelqu’un m’a dit la semaine dernière qu’il ne critiquait ouvertement un restaurant que lorsqu’il avait réellement l’impression que l’on s’était moqué de lui. Partageant tout à fait cette opinion, brèves impressions à la sortie de Dans la sphère de Thierry Marx.

On en parle, on en parle … et même si j’en ai un peu ras la bille de cette danse panurgique à la gloire des sphérifications à l’alginate, je voulais tout de même assister à un de ces événements qui entraînera un peu plus la cuisine moléculaire dans les méandres de ses dérives outrées.
Présentée comme une rencontre d’audace, de créativité et de haute technicité, l’exposition réunit les travaux du physicien Jérôme Bibette et de Thierry Marx, samouraï moléculaire et as de l’écume bordelaise.

"Déstructurer pour reconstruire impose de ne rien accepter comme immuable" ou, comme dirait mamie Laxou, "Faire et défaire, c’est toujours travailler". Très juste, pourquoi se fatiguer à inventer lorsqu’il suffit de refaire ce qui existe déjà ?
Illustration : comment rendre fou de joie le quidam et le suiveur candide en lui offrant une tomate mozza ? Surtout, ne pas procéder à une profonde réflexion, ce serait couper l’élan du génie à l’état brut, de ce genre de génie qui émane généralement de l'entendement de ces petits êtres communément appelés enfants.

Bon, tu vois une tomate-mozza de base : y a la tomate, ronde, avec la chair dedans et la peau dehors, normal, et puis y a la mozza, coupée en tranches sur les tomates ou à côté – plusieurs écoles s’affrontent. Ici, c’est pareil, sauf que c’est l’inverse. Nous avons donc une tomate cubique - déjà, c’est très fort, avec la chair à l’extérieur, la peau à l’intérieur, et la mozza au centre. Tellement trop fort, il faut bien l’avouer, que j’en perds mon latin. No comment sur l’explosion de saveurs que je me contenterais de supposer, m’étant contentée du dessert. (j’ai essayé, mais je ne parviens pas à résister à l’envie de décrire le bœuf-carotte sur brochette : un bâtonnet de carotte enveloppé d'une pâte de bœuf amalgamé, miam).

Le dessert, donc, autour du citron, en trois textures : un carré (il semblerait donc que le carré soit résolument marxien) de génoise au citron surmonté d’une tranche de pâte de cassis, du zeste de citron, et une écume de citron montée à la lécithine de soja. Plutôt joli, dans ce très chouette bento.

Le zeste de citron était très zeste de citron, la génoise digne d’un goûter d’anniversaire réussi, quand à la mousse écumeuse ou l’écume mousseuse … comment dire ? Loin de moi l’idée de vouloir pointer du doigt ladite substance, mais force est de constater que j’ai été malade toute la nuit – passons sur les élégants détails. Cela dit, je ne m’étais pas contenté de ce goûter pour la journée, et n’avais pris que quelques pointes de baguettes de cette eau foisonnée d’une amertume au p'tit goût de “revienzypas“.
Notons que l’absence de cuillère - trop pratique, pas assez concept - a priori absurde est sans doute le point culminant de la sagacité de cette expérience ; le génie a effet su analyser qu’une cuillérée de la chose aurait assurément entraîné le trépassement instantané des visiteurs - va revigorer la réputation de la cuisine moléculaire après ça …

Pour finir en beauté, un café au Whiff Bar, ou la révolution technoémotionelle à portée d’étouffement

Petite note introductive : d'après la brochure sur le Whif, au slogan incroyablement audacieux de "simplement inspirant", nous apprenons que Whiffer est "l’art de se régaler par inspiration" grâce au whif, "innovation culinaire" issue de la rencontre entre gastronomie et science des particules...

Placez le whif entre la langue et le palais, aspirez délicatement, et … étouffez-vous au contact du cacao en poudre réinventé des "particules de poudre de saveurs" chocolatées. Je ne suis pas convaincue que cette "nouvelle expérience culinaire [me] propose un nouveau langage", je ne suis pas convaincue d’avoir été "bercée du plaisir de cet instant fugace" - vaut mieux qu’il soit fugace, en même temps, cet instant asphyxie particulaire - mais je suis sûre qu’on ne me reprendra pas de si tôt à whiffer.

Comptez 15 euros pour la formule goûter, 27 pour la totale, plus 15 pour une bonne entrecôte après coup, pour se remettre de ses émotions.

Le Laboratoire
4 rue du Bouloi.
Paris 1er
01 78 09 49 50, mais voulez-vous vraiment ce numéro ?

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Crème d’asperges vertes mi-cuites au basilic et à la cardamome,
glace à la moutarde d’Orléans

Crème d’asperges
Une botte d’asperges vertes
½ botte de basilic
20 cL de bouillon de légumes
4 cosses de cardamome
50 g de crème liquide
1 cs d’huile d’olive

Laver les asperges, couper la base - réserver quelques pointes pour la déco – et les recouper en trois.
Ouvrir les cosses de cardamome et piler les graines. Laver le basilic et le hâcher grossièrement.
Faire bouillir le bouillon avec l’huile, la cardamome et les asperges. Laisser cuire 5 minutes sans couvrir, retirer du feu, ajouter le basilic et la crème et passer au mixeur. Laisser refroidir.
Blanchir les pointes, les refroidir sous l’eau froide et les couper en deux dans la longueur.

Glace à la moutarde d’Orléans
25 cL de lait entier
25 cL de crème liquide
5 jaunes d’œufs
1 cs de miel / 10 g (pas dans la recette originale)
3 cs de moutarde d’Orléans (à Paris, à la Grande Epicerie ; ailleurs qu’à Orléans, ?)

Battre les jaunes. Faire frémir le mélange lait, crème, miel et verser sur les jaunes. Mélanger et remettre sur le feu jusqu’à ce que le mélange ait bien épaissi. Laisser refroidir et ajouter la moutarde. Mélanger et placer au frais.
Lorsque le mélange est bien froid, passer à la sorbetière environ 15 minutes.

Servir la crème avec une quenelle de glace et une ou deux pointes d’asperge.
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Gratin d’oignons doux au Parmesan et au poivre noir
Pour 2 personnes
300 g d'oignons doux des Cévennes
40 g de beurre salé
4 cuillères à soupe d'eau
40 g de Parmigiano Reggiano
8 tours de moulin à poivre Sarawak (ou pas)
100 g de mesclun (roquette pour moi)
Une pincée de fleur de sel
Quelques gouttes de jus de citron

Eplucher et émincer très finement les oignons en prenant soin d'éliminer le caillot. Dans un sautoir, à feu doux, faire fondre le beurre salé, incorporer les oignons, ajouter l'eau, mélanger le tout et recouvrir d'un papier sulfurisé. Laisser cuire pendant 20 à 30 minutes, à feu moyen, sans coloration.Débarrasser dans des plats à gratin individuels et lisser le tout sur une épaisseur de 5 mm. Répartir le parmesan préalablement mixé sur le plat, puis faire gratiner au grill, jusqu'à coloration noisette.Au dernier moment, répartir de façon homogène la fleur de sel, le jus de citron, le poivre Sarawak et le mesclun.
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Tomate confite aux douze saveurs, crème au thym
Pour 4 personnes

4 petites tomates (il y a en fait assez de farce pour une dizaine de tomate)
200 g de pommes
200 g de poires
75 g d'ananas
1 cs de sucre roux
2 g de gingembre frais
4 clous de girofle
1 g d'anis étoilé râpé
1 g de cannelle
15 g de raisins secs
2 g de zeste d'orange
4 g de zeste de citron
1 g de menthe
10 g de noix
10 g d'amandes
10 g de pistaches
2 gousses de vanille
1 orange
(même j’affectionne tout particulièrement ma balance, le 1 gramme, elle a du mal. J’ai dosé une demie cuillère à thé)

Ciseler les pommes, poires, ananas, gingembre, noix, amandes et pistaches
Hacher les zestes d'orange et de citron.
Disposer dans une poêlon une fine pellicule de sucre brun à caraméliser, y mettre les pommes, poires, ananas et les faire sauter à feu vif de façon à ce qu'ils soient pratiquement cuits, incorporer également dans le poêlon les zestes d'orange, de citron, le gingembre, les clous de girofle, la cannelle, les raisins secs, la menthe ciselée, les noix, les amandes, les pistaches et la vanille.
Mettre cette farce dans les tomates préalablement mondées et épépinées en ayant pris soin de faire une ouverture sur le haut.
Saupoudrer légèrement de sucre le poêlon, faites caraméliser, mouiller d'un jus d'orange et ajoutez la gousse de vanille.
Mettre les tomates dans le poêlon et cuire au four à 200° en arrosant fréquemment pendant 5 à 7 minutes selon la taille de la tomate.

Crème au thym
Recette aléatoire mais résultat probant : j’avais mal conçu la préparation, j’ai finalement fait fortement infuser la crème liquide que j’ai ensuite diluée dans une crème semi épaisse

100 g de crème fleurette
2 branches de thym
1 grosse cuillère à soupe de sucre
50 g de crème semi épaisse

Porter la crème fleurette à ébullition, ajouter le thym, baisser le feu et laisser réduire au moins de moitié. Retirer le thym à l’aide d’une passoire à thé et laisser refroidir.
Verser la crème semi épaisse dans un petit récipient, ajouter la crème au thym et le sucre, mélanger et placer au frais.

Servir les tomates avec leur jus de cuisson et une cuillère de crème au thym.
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Mousse gélifiée d’agrumes

Le pourquoi du comment de This ici
200 g. de jus d’agrume : Orange, Citron vert, Pomelos, Citrons jaunes non traités (pour moi : orange, citron jaune, yuzu et sudachi – citron vert japonais)
5 g de gélatine
2 cs de miel de belle origine
100 g de sucre

Faire chauffer le jus avec sucre et miel. Incorporer la gélatine ramollie dans de l’eau froide. Emulsionner en posant le récipient sur de la glace, on va obtenir une mousse légère extrêmement goûteuse. La répartir directement dans des récipients en verre.
[Accompagner cette préparation d’un sorbet d’amande amère, d’une glace à la pistache, d’une pomme golden confite.]

dimanche 20 avril 2008

« Tronche de Cake, un an après », une orgie de chocolat, et l’entremet du temps qui passe : meringue, pistache, chocolat

Warning Lecteur : aujourd’hui est un grand jour. Sans queue ni tête ni scrupules, nous commencerons par une séquence "de la larme à l’œil en veux-tu en voilà" pour le premier anniversaire de Tronche de Cake, poursuivant par une orgie de chocolat, version parcours initiatique, afin de conclure tout en légèreté par l’entremet du temps qui passe.

Instant émotion à tendance lyrique, une fois n’est pas coutume : je me souviens

Je me souviens du vingt avril deux mille sept.

Je me souviens du Vietnam, de notre cuisine et du four à cinq cent mille dongs que nous avions acheté.

Je me souviens du trajet en mototaxi qui nous conduisait à la maison, le four bringuebalant sur les genoux déséquilibrés du chauffeur.

Je me souviens de la brise noire sur le pont qui mène à Nguyen Huu Canh.

Je me souviens de pâtisseries vertes ou non.

Je me souviens des premiers muffins.

Je me souviens de rires.

Je me souviens des allées suffocantes du marché Ben Thanh, des heures de négoce pour trois mangues, un kilo de ramboutan et cent grammes de pandan.

Je me souviens de la grande ourse.

Je me souviens de séances photos.

Je me souviens de piquant, d’acide et de sucré.

Je me souviens de la pluie qui emplissait les rues mal goudronnées, qui montait jusqu’à la selle des motos et qui nous mouillait jusqu’aux os. Je me souviens des capes de pluie publicitaires, les bleues et les vertes.

Je me souviens des petites baguettes achetées le matin, à peine vêtue et arborant sans gêne ma parfaite imitation de Ray Ban.

Je me souviens du Laos.

Je me souviens de la Vache qui Rit.

Je me souviens des bus, des enfants, des vieux et des fous.

Je me souviens de rizières en cascade.

Je me souviens du retour, l’australienne à mes côtés et de la pluie à l’arrivée.

Je me souviens du quatre juillet deux mille sept.

Je me souviens d’un bureau, d’un labo et d’une séance photo.

Je me souviens de pâtisseries, de chocolat et de Pilêo.

Je me souviens d’un embryon d’idée.

Je me souviens d’une usine.

Je me souviens de septembre et de craintes infondées.

Je me souviens de gourmandises et de repas magiques.

Je me souviens d’un projet qui prend forme.

Je me souviens de la fin d’une époque.

Je me souviens de doutes.

Je me souviens d’un appel où l’on m’annonce que c’est possible.

Un an après la naissance de Tronche de Cake, je me souviens n’avoir rien prévu de tout ça. Un an rempli d’une multitude de rencontres et de cuisine qui se conclue presque jour pour jour sur l’annonce d’une nouvelle époque à venir pour septembre prochain : la pâtisserie, enfin, pour de vrai.

[Fin de la séquence larme à l’œil]

Et ça se fête, parce que c’est pas tous les jours qu’on apprend qu’on est finalement acceptée en bep après un master 2 … Bon, c’était surtout prévu pour l’anniversaire de maman Cookie, mais ça tombait bien.

Maman Cookie, avant de me transmettre un amour immodéré pour JP, avait ses habitudes à la Maison du Chocolat. Il était donc grand temps pour nous deux de faire l’expérience du parcours initiatique – qui, comme le disait notre hôtesse, sonne très vaudou, et c’est tout à fait ça. Rendez-vous hier à la boutique de la rue François 1er pour près de trois heures d'initiation et de dégustation :

Ça débute par l’accueil avec un onctueux et exquis chocolat chaud, avant de vraiment commencer dans une petite salle prête à recevoir les dix accros que nous étions. (En fait, ça commence déjà bien avant, à la réservation, où un petit coffret de trois chocolat est remis ; trois chocolat dont on doit deviner les arômes – et c’est là que je me dis que j’ai bien fait de parier lourd avec Maman Cookie sur les bonnes réponses, parce que, ok, c’est son anniversaire, mais quand c’est du citron c’est pas du caramel)

Un vrai voyage, de l’origine et la transformation du cacao en chocolat, jusqu’au travail des artistes de la Maison, orchestrée avec humour par notre charmante gourou, heureuse propriétaire d’un cacaoyer en plein Paris vaporisé à l’Evian, le coco.

Récolte des cabosses, écabossage, fermentation, séchage, torréfaction, broyage, conchage, tempérage … Et quand j’apprends que le cacaoyer est souvent touché de la maladie du balai de sorcière – hi hi, qu’il faut prendre garde au stress hydrique – re hi hi, qu’il faut 3 cabosses pour 100 grammes de chocolat, qu’il y a 500 arômes dans le cacao, je me dit que j’ai pas perdu mon temps, et qu’il faut le mériter, son chocolat.

Le tout ponctué de dégustation de cacao sous toutes ses formes : de la fève, du grué, de la couverture, du chocolat 100%, des ganaches onctueuses et subtiles, de très fins pralinés, jusqu’aux excellents macarons … - même si my heart belongs to JP.

Pour mettre un peu la main à la pâte, la séance s’est finie par une ganache infusée au thé réalisée par mes petites mains – puisqu’il fallait un volontaire, et puisque j’avais une folle envie de porter le très chouette tablier de la Maison …

Et au cas où on n’aurait pas eu notre dose de théobromine pour la journée, chacun est reparti souriant et comblé avec une tablette, une petite boite de chocolats et un gobelet rempli de la ganache susmentionnée.

[ vous en voulez encore ? une tablette en rab est offerte à celui qui saura dire ce que représente le logo de la Maison du Chocolat – MOI JE SAIS, MOI JE SAIS ]

Moralité : plus on est chocolat, plus on rit.

Reprenons : deux anniversaires à célébrer (maman cookie et tronche de cake, tu suis ?), ça donne quoi ? ça donne du chocolat again, mais pas que, avec un gâteau qui prend son temps pour célébrer celui qui passe : du croquant meringué, du crémeux pistaché, du mousseux chocolaté. A déguster avec une crème à la pistache pour couronner le tout. What else ?

La version collective ayant été joyeusement engloutie en trois minutes et demi, je n’ai fait des photos que de la version individuelle rescapée.

Concluons sur un évènement d’importance majeure, matière à réflexion : vendredi matin, tandis que je me prépare mollement à affronter une autre de ces journées débordante d’assurance vie, la nouvelle du siècle tombe sur moi, telle une entremise divine offrant la Révélation au fidèle (et je pèse mes mots. Wait for it). En proie à une seconde de doute quant à mon projet existentiel et non moins sucré, que vois-je ? Je suis née le même jour que Jean-Paul Hévin. Si c’est pas un signe de Dieu himself …

La Maison du Chocolat - Parcours initiatiques
52, rue François 1er, 75008 Paris
Réservation : 01 47 23 38 25


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L’entremet du temps qui passe : meringue, pistache, chocolat

Meringue
3 blancs d’œuf moyen
150g de sucre glace
1cs de sucre

Préchauffer le four à 100°.
Tracer deux cercles de 20 cm sur du papier sulfurisé (de la taille du cercle à pâtisserie utilisé) - et deux petit pour une version individuelle.
Battre les blancs à vitesse moyenne en ajoutant la cuillère de sucre au début ; quand ils sont bien mousseux, verser le sucre glace petit à petit. La meringue doit être très brillante avec un petit côté satiné - très tendance, donc.

Option 1 : vous n’avez pas perdu votre poche à douille : dresser un cercle de meringue assez épais sur le papier sulfurisé en formant une spirale (en partant du milieu) et un autre moins épais, enfin plus fin quoi – idem pour la version mini.

Option 2 : vraiment, vous ne voyez pas où elle peut être, cette f…ing poche : étaler tant bien que mal la meringue et lisser
1/ à l’aide d’une spatule, coudée c’est encore mieux ;
2/ vous n’êtes absolument pas en possession de spatule, coudée encore moins : débrouillez-vous (en coupant le coin d’un sac congélation, ou encore à la force de la maryse et de la tranche d’un grand couteau, ça marche aussi si on se concentre très fort en plissant les yeux) ;
3/ vous n’avez ni meringue ni spatule ni cuisine ni sac congélation, d’ailleurs vous ne lisez la recette que pour le plaisir : vous êtes étrange mais n’avez donc pas de problème.

Faire cuire la meringue au moins 2h, laisser refroidir dans le four. Je l’ai mise en timer approximatif en partant m’occuper d’assurance vie le matin : parfait le soir.
Réserver – ou conserver hermétiquement si, comme il se doit, vous prenez votre temps.

Crémeux à la pistache
240mL de lait entier
3 jaunes d’œufs
60g de sucre
20g de maïzena
1 feuille de gélatine soit 2g
60g de pâte de pistache

Faire ramollir la gélatine dans de l’eau froide.
Même principe qu’une crème pâtissière : blanchir les jaunes et le sucre, ajouter la maïzena. Faire chauffer le lait avec la pâte de pistache ; dès qu’il frémit, verser sur le mélange et remettre sur le feu. Faire épaissir ; retirer du feu et ajouter la gélatine essorée. Bien lisser et laisser refroidir un peu. Répartir la crème sur le cercle de meringue épais, lisser et faire durcir au congèl.

Mousse au chocolat
5 blancs d’œufs
230g de chocolat noir 86%

Faire fondre le chocolat au bain-marie – amen.
Monter les blancs en neige ferme avec une pincée de sucre. Verser le chocolat sur les blancs - et non l’inverse – et mélanger délicatement mais pas trop non plus jusqu’à ce que les blancs soient incorporés.

Verser sur le fond de crémeux à la pistache et placer au frais.
Au moment de servir, quand les carottes sont cuites et que la mousse est prise, poser le second cercle au-dessus.

Crème à la pistache
100 g de crème liquide semi-épaisse
30 g de sucre
30 g de pâte de pistache

On mélange et hop, au frais.

mercredi 9 avril 2008

L’assurance vie et moi, et l’entremet de survie : yuzu et chocolat au lait

L’assurance vie, vous connaissez ? Moi non plus. Enfin je supposais ingénument que ça n’augurait pas grand chose voire rien de bon, point – point barre même. Quelle ne fut donc pas ma surprise lorsque j’ai appris que j’allais devoir me confronter à la bête. Le problème de l’innovation, c’est qu’elle se fourre partout, même là où croirait être tranquillou. Un peu comme la taupe, quoi. La taupe a donc surgi dans ma vie pas trop assurée un beau matin, en quête d’attention révolutionnaire. Moui, après le beau temps de l’innovation glamour et/ou high tech, 2.0, 3.0, gadget, éco-citoyenne, mais surtout alimentaire, voici venu l’innovation du placement financier.

Afin de répondre à l’essentielle question préliminaire à mon labeur « l’assurance vie, quoiquesse ? », je me prépare physiquement : café, clémentines, aspirine. Je me lance dans l’examen de la fiche produit à corps perdu.

Mais à peine me suis-je penchée sur la sympathique fiscalité des contrats multi support qu’un grattouillage de la paroi nasale gauche me prend. Aaaatchoumaaa. A mes souhaits. Je tente de poursuivre, mais le gratouillage reprend de plus belle, suivi d’une quinte de toux que je qualifierais de pas franchement classe, malgré mes efforts intenses d’atténuation. Un tourbillon m’entraîne dans un brouillard fiévreux :

Qui suis-je ? Où vais-je ? Pourquoi n’ai-je pas déjà une assurance vie pour assurer mon avenir de pakistanaise professionnelle ? Je vogue entre les usufruitiers et les nus-propriétaires qui disposeront peut-être d’une créance successorale s’ils sont pas trop chiants, et angoisse à l’idée de devoir choisir l’unité de compte, le fonds actions ou le fonds euro. Moi aussi je veux un cadre fiscal privilégié, moi aussi j’ai le droit à une valorisation de ma plue value (quoi quelle plue value ? elle arrive, j'ai la foi).

Mais non, il semble que je présente une forme rare d’allergie à l’assurance vie : l’étudier, c’est succomber. Comment ça, c’est psychosomatique ? et mes quarante-trois mouchoirs dont je vous passe les détails répandus autour de moi, c’est psychosomatique ?

Y a pas à tortiller, je suis malade, sans même une petite protection financière pour assurer l’avenir de mes proches, ni de mes moules en silicone, ni de Mr Aid. Une heure de plus devant l’explication des différents profils d’assurés et je tombais dans un profond coma – en ayant pris soin d’exploser mon ordinateur et tous ses PowerPoint avant. Reste plus qu’à expliquer ça à mes supérieurs. Sauf que ça va quand même durer un petit moment.
Aux grands maux les grands remèdes : fuir.

Fuir et pâtisser. Voici donc l’entremet de survie au yuzu et au chocolat au lait.
Du yuzu pour la vitamine C, du chocolat au lait pour le magnésium, de la génoise imbibée au thé noir pour l’énergie et l’antioxydant hype. Miam.

Ouais, miam. Sauf que j’apprends ce matin, à peine remise sur pied, que Fromentin a besoin d’aide sur un autre dossier du type Mourrance financière à petit feu.
A suivre

***
Entremet de survie au yuzu et au chocolat au lait

Génoise
2 oeuf moyen
60g de sucre
60g de farine

Battre le sucre avec les oeufs dans un bain-marie jusqu'à ce que le mélange blanchisse et triple de volume.
Retirer du bain-marie et continuer à battre jusqu'à ce que le mélange soit froid. Ajouter ensuite la farine et l'incorporer à la maryse.
Etaler en couche fine sur une plaque recouverte de papier sulfurisé et cuire à 180°C entre 12 et 15 minutes.

Sirop : 200g eau / 150 g sucre / thé noir
Imbiber la génoise de sirop au thé et réserver.

Ganache au chocolat au lait
200 g de chocolat au lait
100 g de crème liquide

Faire fondre le chocolat haché finement au bain-marie. Ajouter la crème et mélanger. Verser sur la génoise en réservant quelques cuillères pour la splendide déco.

Mousse au yuzu
3 œufs
100g sucre
75mL de jus de yuzu
2 feuilles de gélatine

Faire ramollir la gélatine dans de l’eau froide.
Dans une casserole, blanchir les jaunes avec le sucre ; ajouter le yuzu et faire épaissir sur feu doux en remuant. Ajouter la gélatine essorée et mélanger.
Battre les blancs en neige ferme et les ajouter délicatement à la préparation.
Verser la mousse sur la ganache, lisser et placer au frais – voire au congèl pour une découpe plus facile.

Last étape :
Couper de magnifiques parts d’entremets. Chauffer le reste de ganache et s’amuser à essayer de faire des déco sans passer par la case poche à douille ou cornet.