Tout ce que je retiens, c’est que les grèves permettent de se barricader tranquillement chez soi, en toute impunité, puisque soit les cours sont annulés, soit on a un alibi imparable pour ne pas se bouger, soit les deux.
J’ai à peine émis un froncement de sourcil quand le panneau de la RATP m’a lumineusement suggéré - en vain, faut pas pousser non plus - une attente de 39 minutes pour me rendre au séminaire de gastronomie moléculaire (sur la crème pâtissière : si quelqu’un y était, un petit débriefing est le bienvenu).
C’est vrai que c’est assez drôle, en fait, de devoir supplier les chauffeurs de taxi – libres, d’après la signalisation communément admise – de bien vouloir : ralentir, daigner détourner le regard vers vous, petite chose à demi congelée, puis écouter le libellé de la destination. Là, c’est la vengeance du chauffeur de taxi : il est tout-puissant, il a droit de vie ou de mort sur le déroulement de votre soirée, qu’il exprime en toute simplicité, d’un rapide mouvement de menton. Une fois embarquée, le soulagement et la chaleur retrouvée sont tels que vous vous surprenez à écouter sans faillir ledit chauffeur se féliciter de la qualité de sa grosse voiture, de la médiocrité de sa progéniture, ou autre petit aphorisme impromptu sur le divorce des Sarkozy.
Peu importe, en fait, rien de magistralement transcendant, sauf si on se plaît à entendre Laurent Boyer ponctuer le défilé des robes en chocolat (plutôt en robes qu’en chocolat d’ailleurs) de « soi-même » : première fois, je m’étonne (« Mesdames et Messieurs : Jean-Paul Hévin, soi-même ! » ??), deuxième fois, ça me picote les gencives (« Mia Fraye, soi-même »), troisième fois (« Christian Karembeu, soi-même »), je voudrais pouvoir diriger le jet de la fontaine de chocolat sur lui pour le faire taire.
Mais je me retiens, mon attention temporairement détournée sur l’apparition soudaine de Michalak (entendons-nous : pas le champion de rugby, le champion du monde de pâtisserie, soi-même, officiant au Plaza Athénée), là, à vingt-deux centimètres de moi, qui me dit bonjour, l’air de rien.
Conclusion de la soirée : moins d’un demi cm² de chocolat Aoki avalé, rien bu, quasiment rien vu. Oui je sais, ça fait un peu (ça me fait beaucoup rire, mais ça se discutte)
Bref, revenons à l’actualité immobilisée. Que la grève continue, ou pas, ce que j’en retiens, c’est que ces histoires de régime spécial de retraite me permettent d’instaurer un régime spécial de week-end, contre le froid, et pour les réserves énergétiques, avec une tarte au chocolat et aux marrons, à l’ancienne.
En marketing, on aime bien dire « à l’ancienne ». D’abord, parce que ça fait quelque chose à dire. Aussi, parce que ça fait vrai, et Mme Michu aime bien ce qui est vrai : le terroir, les nappes vichy, le roquefort et les chips, ça la connaît. Du coup, elle dégaine sa carte.
En bonne futur
« Élaborée par une équipe solidaire d’artisans à l’écoute de la terre/une étudiante gelée à l’écoute de son estomac à partir des meilleurs ingrédients, cette tarte au chocolat et aux marrons transformera votre pathétique dessert quotidien en un instant de volupté, d’émotion et d’euphorie.
Joyeuse onctuosité du beurre d’Isigny mêlé au beurre à la fleur de sel de Guérande, marrons d’Ardèche rieurs et savoureux rehaussés d’une touche ensoleillée de vanille de Madagascar, sombre puissance et richesse d’un chocolat noir 70% pur beurre de cacao, nous avons travaillé sans relâche/mouliné à la vie à la mort pour vous offrir un pur moment de sensation/kiff.
En effet, nous ne nous sommes pas contentés d’une vulgaire purée de marron en boîte C.F ou en sachet de chez Mr P., deux grands hommes au demeurant ; bien au contraire, notre volonté de vous satisfaire/incapacité à trouver de la purée toute faite nous a conforté dans l’idée de confectionner nous-même notre purée de marron, dans le plus grand respect de la tradition paysanne de Paris, grâce à ce formidable outil que l’on nomme couramment un presse-purée.
Témoins de ce travail artisanal, les brisures de marrons permettent de ne pas tomber dans l’uniformité lassante de la parfaite homogénéité et participent à la splendeur transcendante de ce met, en tout point opposé à une beauté classique à la … - compléter avec le nom de l’actrice à qui vous avez envie de faire manger son mascara.
Nous vous épargnons les détails concernant le délice de la pâte sucrée, dont la réputation n’est plus à faire.
C’est ainsi que nous sommes parvenu à ce résultat merveilleux, comme une grande vague de doux réconfort. La simplicité revendiquée »
Voilà, presque tout est vrai. Vous achetez ?
Note : ma tarte à l’ancienne est carrée, et puis ?
Tarte au chocolat et aux marrons à l’ancienne
Une pâte sucrée/sablée
280 g de marron au naturel
70 g de sucre
1 cc de vanille de Madagascar en poudre
100 g de chocolat noir 70%
70 g de beurre (moitié beurre doux d’Isigny, moitié beurre à la fleur de sel)
Préparer la pâte dans les règles de l’art. Préchauffer le four à 180°.
Foncer un moule à tarte – ou pas – beurré. Piquer la pâte et placer 30 minutes au frais.
Couvrir de papier sulfurisé, remplir de pois chiche et faire cuire 15 minutes. Retirer les pois chiches et le papier et remettre au four une dizaine de minutes, jusqu’à ce que la pâte soit dorée.
Pendant ce temps, réduire les marrons en purée pas au top de son homogénéité, pour le côté la vie, la vraie. Ajouter le sucre et la vanille.
Faire fondre le chocolat au bain-marie. Ajouter le beurre.
Hors du feu, ajouter la purée de marron. Bien mélanger et verser sur le fond de tarte. Lisser la surface en laissant quelques irrégularités, symboles d’authenticité.
Placer au frais quelques heures.
Déguster au coin du feu, ou du radiateur, selon.
Rhôôô, pas bon pour mon régime, ça, pas bon du tout... nan nan na...
RépondreSupprimerOula. Mais OULA. Une Tuerie ce truc là encore ! bravo :)
RépondreSupprimerJ'adore le "en laissant quelques irrégularités, symboles d'authenticité" ;-). Ca me plait bien cette conception de la cuisine! Et ta tarte me fait baver d'envie!!!!
RépondreSupprimerC'est l'autre Michalak soi-même qui aurait du se satisfaire de ta tarte, il nous aurait (peut-être) satisfait hier soir...
RépondreSupprimerSinon, je suppose que tu ne te laves plus la main qui a serré celle du grand, du vrai, du beau Michalak et qu'ainsi par une divine providence tous tes desserts ressemblent aux photos des grands magazines...
Bon week-end
Encore une fois tu m'as fait sourire tout le long de ton billet :)
RépondreSupprimerJ'attend de pied ferme (et pas trop gelé, ici, ça va...) ta photo demain...
et si tu décide de monter dans le TGV Est (il est chauffé) tu me fais signe...
A déguster au coin du feu pour moi !! le paradis quoi !!!
RépondreSupprimerExactement ce qu'il faut pour un gouter le dimanche au coin du feu surtout quand il neige comme ici!
RépondreSupprimerBonne soirée.
Super ta tarte !
RépondreSupprimerPour les parisiens je dirais plut�t : I love concepts, I'm pariesien.
On voudrait pas s'organiser une rencontre blogguesque ?
Ben sois on se met d'accord sur un lieu sympa qu'on aime (le resto jap recommandé par Loukoum dans Paname que j'ai testé aussi et qui est à tomber, je connais un VRAI resto chinois, ou autre chose ??), soit on fait une rencontre quelquepart et on amène toute un truc qu'on a fait.
RépondreSupprimerOulllllalalalala que du bon la dedans .. miammmm
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