dimanche 25 novembre 2007

Préavis de grève : cuisine sans couleurs - panacotta chocolat blanc et sésame noir

J’en ai marrrrrre de cette p… de grève, mais alors marre ... Bon d’accord, ça se finit tranquillement. (c’est même complètement fini mais c’est pas parce que c’est marqué publié le … que ça a été fraîchement pêché du jour) Mais quand même. Je tiens à manifester mon immense mécontentement. Parce que c’était bien marrant, les premiers jours, de glander l’âme tranquille (le personnel administratif de l'institution vaguement scolaire dont je fais partie ne fait pas grève, mais est encore plus larvesque que ses étudiants, ils ont décidé par conséquent de prendre les devants et d'annuler tous les cours), de se contenter d’aller se traînasser dans le pâté de maison, de rendre visite aux compères voisins, dont le Monop’ et le marché, mes chers et tendres, de rentrer cuisiner un peu, regarder quelques dvd, lire quelques bouquins, feuilleter quelques magazines.
Mais à un certain moment, les magazines donnent envie de faire des choses, des choses qui demandent généralement à la fois de l’argent et un déplacement géographique : car mettre à profit son pouvoir d’achat, ça se mérite, voyez-vous. Et puisque le Vélib’ et moi, comme chacun sait, ça fait deux, on a l’air un peu con, ma fièvre acheteuse et moi. Mais ça, à la limite, ça se repousse, y aura toujours moyen de se ruiner, surtout par les temps qui courent.

Mais quand soudain une prise de conscience vous frappe sans prévenir, vous réalisez avec stupéfaction que vous n’avez pas mis les pieds à l’école depuis … non, déjà ? 9 jours ? Alors, bon an mal an, vous vous renseignez, vous apprenez que, éventuellement, il pourrait y avoir quelques animations de type marketo-marketing, donc vous prenez vos pieds et votre cahier, bottes, écharpes, gants et une pièce de 50 centimes pour la machine à café qui sera peut-être dans un bon jour, et hop, in the metro.

Et là, plaisir contraint, vous goûtez aux joies de l’attente, autorisant un retour sur soi, sur sa vie, son oeuvre, ses objectifs, rêves et attentes, regrets et remords, plan d'attaque à mettre en place, un mini bilan quoi – oui, car en 35 minutes on a bien le temps de faire un diagnostic quasi exhaustif – puis, enfin engouffrée entre un géant assurément inhospitalier et une naine frisée en fourrure tachetée (très douce, cela dit, la fourrure. je dirais du lapin des neiges), vous savourez la chaleur des contacts humains, les odeurs capillaires douteuses et autres détails subtils et délectables. Il y a une sorte de solidarité spontanée dans l’air – enfin, sauf la vieille au rouge à lèvre carmin (ou peut-être vermillon, ou pourpre, ou vermeil. Moche en tout cas) et à l’odeur capiteuse d’une fragrance d’avant-guerre qui se faufile subrepticement dans la rangée, aux aguets de la place qui se libèrera incessamment.

Enfin, vous dégustez avec une délectation non dissimulée la scène qui se met en place à quelques accolades de vous : deux hommes de bonne allure, l'un à lunettes, l'autre sans, style jeunes loups aux dents longues, costard cravate, after shave mentholé, gomina et attaché case, qui, soudainement, entament un échange verbal pas classe du tout. Ça commence simplement par un « excusez-moi, auriez-vous l’obligeance de décaler votre être corporel afin de frayer un chemin à cette lady qui émet l’hypothèse de descendre de ce véhicule mobile ? » et ça se poursuit malencontreusement par « Mais biiip (putain connard) tu vois pas que j’peux pas bouger, j’l’biiiip(emmerde) la lady, t’as qu’à bouger toi-même biiip (connard) ». Oh, oh … animation, animation !
Ce que j’aime le plus, dans ce genre d’aventure urbaine, c’est la répartie du type qui tente de garder son flegme et sa dignité quasi britannique, envers et contre tout, malgré la puissance de ses instincts bestiaux : « Heu, monsieur, je ne me serais au grand jamais permis de vous offenser, et je ne vous permets point de me tutoyer, nous n’avons guère élevé de canards colverts ensemble, me paraît-t-il, sommes-nous en harmonie intellectuelle sur la question ? » … Silence in the wagon, la tension est à son comble – certains tentent de s’éloigner tant que possible … « P… con….ard j’te tutoies si j’veux. Enlève tes lunettes de biiip (merde). Tu veux qu’on aille en parler dehors ??? »
Visiblement (mine déconfite du tout petit nain face à un King Kong affamé), l’homme n’avait pas le projet d’aller en parler dehors, ni d'enlever ses lunettes, et l’autre devait de toute façon descendre à Bourse. Fin de l’histoire. Voilà comment on commence une bonne journée.

J’adore Paris.


Comme tout le monde, j’en ai marre de cette situation ridicule, j’ai donc décidé de faire grève. Ça va faire bouger les choses, j’en suis sûre. Et puisqu’il faut faire les choses dans les règles, je lance d’abord un préavis. Je commence calmement avec une journée de grève des couleurs, avant des mesures plus radicales. Plus de vert pandan ni pistache, plus de rouge framboise, plus de marron chocolat, plus d’orange potiron, plus de jaune citron, rien, des non couleurs : noir et blanc.
Et une panacotta chocolat blanc et sésame noir, à l’agar agar et crème de soja of course, crémeuse à souhait, alliance délicate de la douceur du chocolat blanc et de la saveur si particulière du sésame noir.

***
Panacotta chocolat blanc sésame noir

Pour 4 personnes
- 25 cl de lait
- 25 cl de crème de soja
- 120 g de chocolat blanc
- 15 g de pâte de sésame noir [+ 2 gouttes de colorant alimentaire noir (facultatif)]
- environ 1g d’agar agar
- quelques graines de sésame blanc

Faire fondre le chocolat blanc doucement au bain-marie.
Pendant ce temps, faire chauffer le lait, ajouter l’agar agar et laisser frémir 30 secondes. Baisser le feu. Ajouter la crème de soja et bien mélanger.
Diviser la préparation en 2/3 1/3 (à vue de nez): dans les 2/3, ajouter le chocolat blanc et bien mélanger, verser dans les verrines et faire prendre au congel 5 minutes.
Mélanger la pâte de sésame noir au 1/3 restant, ajouter une ou deux gouttes de colorant noir – ou pas, mais c'est plus classe – et bien mélanger.
Sortir les verrines et verser la préparation au sésame noir.
Réserver au frais quelques heures.
Décorer avec quelques graines de sésame blanc.

dimanche 18 novembre 2007

Mais qu’est-ce qu’on ferait pas … - Tiramisu matcha marron, fondants marron chocolat, et autres chocapics au pandan

L’anniversaire de la Reine du Château d’Eau - dite aussi Reine Mathilde, ou M-C DV (Marie-Claire de Voissieu, Présidente des associations Des moules et des gâteaux, Au feu Onfray, membre honoraire du Comité des Adorateurs du Pandan – qui élargit aujourd’hui majestueusement le spectre de ses activités par des entretiens au pied levé avec quelques personnalités du monde du cinéma, mais aussi avec des actrices qui chantent) – donc, l’anniversaire de la susdite personnalité est un évènement d’importance. Ma première goûteuse, ma première commentatrice, ma première source d’encouragement, un modèle d’ouverture papillesque (rapport à quelques expériences agar-agaro-vietnamiennes épargnées aux lecteurs cause risque de choc visuel irréversible auprès des âmes sensibles), un puits d’inspiration sans fond ni loi. Bref : une muse.

Interruption intempestive : alors là, c’est le pompon. Facebook (le réseau social ultra marrant 5 minutes, où on retrouve en 3 coups de cuillères à clic tous les êtres humains qui ont croisés notre route, même ton voisin de couveuse, mais surtout où tout le monde te retrouve, surtout ceux qu’on a enregistré dans notre répertoire à « ne pas décrocher ») m’indique que je suis expressément invitée à rejoindre la « Grande Manifestation Contre le Blocage des Syndicats » (est-ce qu'ils pensent que les majuscules donnent vraiment de la crédibilité ?). Sérieusement ? On se connaît ? Tu crois qu’en plus d’être coincée dans un périmètre de 2 kilomètres à la ronde, je vais aller me geler collectivement les orteils pour brailler « pas content ! » ? On peut plus hiberner tranquille, c’est dingue cette technologie.

Re bref : j’adore, mais alors j’adooore, quand elle me fait le coup du « oh mais non t’embêtes pas à faire un truc (comment ça, un « truc » ??), en plus t’as plein de boulot en ce moment, c’est vraiment pas important … ». Elle imite super bien le ton « je me situe tout à fait au-dessus de la matérialité culinaire et suis beaucoup plus axée sur la richesse humaine, voire intérieure ». Moi : « c’est vrai que je sais pas si j’aurais vraiment le temps de préparer quelque chose » Elle : « … » (tellement électrique, le blanc, que je me suis quasi pris une décharge)

Non mais vraiment, qu’est-ce qu’il faut pas entendre. Moi ? Moi, je vais débarquer à son anniversaire les mains non sucrées, ou pire, avec une bouteille de Chardonnay Monop’ ??? C’est mal me connaître, ma p'tite.
Alors bien sûr, il fallait trouver des idées. Parce qu’un anniversaire, ça se fête en sucré, mais surtout parce que je devais me lancer dans un défi qui m’avait été lancé quelques mois avant : des Chocapic au pandan.

Allez savoir pourquoi, Mme M est dingue de Chocapic. Elle tuerait père et mère pour un bol de ces trucs. Du temps de l’interculturalité toute puissante au 135/17/31 Nguyen Huu Canh, il fallait la voir s’illuminer soudainement à la vue de Pico tenant fièrement la pose sur la boîte sortie de la valise de je-ne-sais-quel visiteur venu d’Occident. Il fallait aussi la voir mâchouiller mollement, le matin, mine déconfite devant TV5 Monde, se contentant de l’insipidité de l’ersatz local, les Coco Crunch.

Après réflexion intense et moult visualisations du début du commencement du comment faire, j’ai conclu que, si je ne disposais pas d’une usine à Chocapic, même modèle réduit, ça risquait d’être un peu tendu. Et puis, la veille du jour J, une consultation professionnelle me donne un espoir : « c’est facile, yaka les enrober, tu fais fondre du beurre de cacao au bain-marie, tu mets ton pandan un peu tempéré, tu mixes et tu pulvérises » Ah, d’accord. Bon, et ben on va tenter. Mais je ne suis pas convaincue de pouvoir reposer mes lauriers sur l'expérience. Et puis on va pas mettre des bougies sur des céréales de sale mioche. Donc

Après réflexion intense (oui, encore, je suis très réfléchissante), j’ai choisi le tiramisu. Parce qu’elle aime pas ça. On croit rêver. Elle aime pas ça, elle aime pas ça, mais non, c’est le café qu’elle aime pas, mais on peut faire un tiramisu qui n’en sera plus un, sans café, why not avec du thé ? Ça, le thé, elle aime je t’ai montré ma collection de thé ? non ? alors là, c’est le thé à la rose, au gingembre, thé aux artichauts (?), aux châtaignes, earl grey, Jaïpur, fumé de Chine, noir du Japon, violet d’Ouzbékistan … Et je t’ai raconté le thé au beurre du Népal ? … c’est complètement dingue… »)
Et puis un tiramisu à la crème de marron, je le sens bien. Ce sera donc un tiramisu matcha marron, association déjà tentée – déjà approuvée.

Reste à considérer que, dans une assemblée constituée de gens normaux, forcément, y’en aura les ¾ qui seront un poil qui développeront une réticence réflexe au matcha. Et oui, c’est assez fou mais figurez-vous qu’il existe des gens qui ne se tiennent pas du tout au courant des tendances culinaires (oui je sais, le matcha a passé depuis un bout de temps son heure de gloire ; la preuve, y a des éclairs au matcha chez Fauchon. Au fait vous saviez qu’il y avait des Kit Kat au matcha ?). Toujours est-il qu’il faut bien les nourrir, ces cons. Et puis un anniversaire sans chocolat, c’est pas un anniversaire. Alors de petits fondants chocolat crème de marron, fondants, mais fondants …

Et les Chocapic dans tout ça ? Ne partageant pas du tout cette addiction, le passage à la caisse avec la boîte – forcément uniquement dispo en format maxi famille nombreuse décomposée recomposée – m’a été assez douloureux. Mais qu’est-ce qu’on ferait pas … alors je l’ai fait. Les voilà, les Chocapic au pandan, les Chocapan :

Ça n’a pas marché aussi bien que j’aurais voulu et ça a été beaucoup plus salissant que prévu, mais quand même, le résultat atteste d’un effort certain. Voilà comment je relève les défis.
Alors, heureuse ?

A part ça, les grèves ont transformé la semaine en mini hibernation et, outre ces occupations culinaires, je me suis laissée tentée par un petit reportage fort intéressant : la guerre du Camembert (disponible sur le site d’arte jusqu’à mardi). 45 minutes d’un sujet si caricatural qu’on touche à l’absurde. Choisissez votre camp : le gentil Mr Meslon, l’encyclopédie vivante du Camembert – la grande classe quoi – ou le méchant Mr Morelon, Directeur de la communication de Lactalis ? Quelques lettres et un océan de fromage les séparent … Du coup, ça m’a donné envie de revoir Mondovino. Me voilà donc calfeutrée au chaud, trop effrayée par l’idée de me faire attaquer par un camembert japonais ou une bouteille de vin au petit goût de toastiness de cette face de rat de Michel Rolland …

***
Tiramisu au thé matcha et à la crème de marron

Une vingtaine de boudoirs
250 g de mascarpone
3 œufs
150 g de crème de marron C.F.
2 cs de thé matcha

Diluer une cuillère à soupe de matcha dans une demie tasse d’eau (25cL ) frémissante. Laisser refroidir.
Mélanger le mascarpone aux jaunes et ajouter la crème de marron.
Monter les blancs en neige ferme et les ajouter délicatement à la crème de mascarpone.
Tremper rapidement les biscuits dans le thé et les étaler dans un plat de service (le même que celui de mémé mais en mieux, genre simple, transparent, sans les fleurs quoi) ou, en version individuelle, dans de jolis verres, comme ces splendides verres à martini qui devraient servir aux apéros mais y en a pas tous les jours chez moi des apéros, cause proximité aïeule, ce joyau du patrimoine hellénique.
Verser une couche de crème, superposer une couche de biscuit, puis une couche de crème.
Laisser reposer au frais au moins 4 heures, voire douze.
Au moment de servir, tamiser une cuillère à soupe de matcha.


***
Fondants marron chocolat

350 g de crème de marron
65 g de chocolat noir
50 g de beurre demi-sel
2 œufs

Préchauffer le four à 170°.
Faire fondre le chocolat au bain-marie. Ajouter le beurre, puis la crème de marron, bien mélanger. Hors du feu, ajouter les œufs l’un après l’autre et bien homogénéiser.
Verser dans des moules à mini muffins, mini cakes … et enfourner un peu moins d’1/4 d’heure – selon les fours. Laisser refroidir avant de démouler.

Version originelle grand format : 500g de crème de marron, 100g de chocolat, 100g de beurre, 3 œufs. Cuisson : une vingtaine de minutes

dimanche 11 novembre 2007

Autour de Novembre – Cookies, Muffins, Chutney

Le mois de novembre a ceci de particulier qu’il ne présente précisément aucun intérêt, ni particulier, ni général, ni visible, ni sournois : rien, le Néant fait mois.

Hasardeusement intercalé entre octobre, lui-même caractérisé par la prolongation harmonieuse de septembre et sa cohorte d’événements de rentrée (rentrée littéraire, rentrée scolaire, rentrée auriculaire – noter ici la maîtrise totale du dictionnaire des rimes) et décembre, mondialement réputé pour ses réjouissances et indigestions festives et familiales, novembre semble être le débris mal-aimé de du calendrier, la vieille miette perdue au fond du lit et qui y demeurera jusqu’à complète absorption par nos amis acariens, le rejeton honteux dont on ne peut pas ouvertement se débarrasser (à moins de succomber au geste hype du moment, le ligotage-congelage, mais l’actualité récente nous prouve que ce type d’initiative est voué à être découvert et condamné).

Il a donc fallu le caser discrètement, tout en le ponctuant de quelques évènements d’intérêt mineur afin de ne pas éveiller les soupçons quand à sa vanité absolue.
C’est ainsi que le mois de novembre s’ouvre sur la Toussaint : je sais pas pour vous mais perso je fréquente pas trop les Saints, à la rigueur Saint-Lazare, mais sinon je sais pas, c’est peut-être leur air vaguement vénérable, ça me crispe.
La célébration est donc de courte durée, et nous pouvons tranquillement aller faire quelques emplettes dans les temples de la consommation du coin, bien vivants, eux, et grands ouverts aux fidèles pour l’occasion.
A ce stade, nous ne remarquons donc pas encore le changement de mois qui s’installe en toute perfidie.


Paradoxalement, ce n’est que lorsque l’épidémie foudroyante de rhumatite aigue débarque que l’on remarque enfin que quelque chose a changé : l’esprit habitant le corps flasque et grelottant s’éveille, entre mouchoirs et stérimar, et remarque qu’en dehors de la couette, point de salut, puisqu’il y fait très froid et qu’il n’y a pas encore de vendeurs de marrons grillés en doudoune fourrée, qu’il est encore un peu tôt pour s’atteler à la rédaction des bonnes résolutions du nouvel an – et puis de toute façon celles de la rentrée de septembre n’ont pas encore fait tout à fait été exploitée jusqu'au bout, alors à quoi bon.
Nous continuons donc tranquillement à ne pratiquer aucune activité sportive hormis cuisiner, déjà bien périlleux, manger beaucoup trop de chocolat pour une physionomie de type « normal, sans superpouvoirs métaboliques saillants», et à reporter quelques impératifs (« call Suzanne the conseillère financière, cause trou de la sécu sur mon compte, rapport à Londres »).


Il y a en plus des années particulièrement calamiteuses en matière de novembre, par exemple, au hasard, celle-ci, où le 11 novembre a le mauvais goût de tomber un dimanche, comme si vous alliez prendre votre dimanche pour mener une réflexion tolstoïenne sur l’inanité de la belligérance dans le monde et l’amitié profonde que vous portez au peuple allemand.

(interruption intempestive : je viens de choper la présentatrice de France Inter en flagrant délit de novembrasthénie foudroyante : à propos des grèves, des morts, des armistices « mouais, enfin bon, un jour de novembre quoi »

Il ne reste donc plus qu’à attendre d’atteindre la lumière au bout de ce long et ténébreux tunnel, parsemé de partiels par-ci, recherche de stage par-là. Mais vous pouvez faire confiance aux magasins et magazines pour anticiper sur décembre : le Monop flamboie déjà de mille et une paillettes noëlesque signifiant subrepticement que si vous n’avez pas commencé à préparer les mises en bouche du réveillon, vous êtes à la fois clairement irresponsable et totalement indigne de la société ; l’horoscope de votre magazine repose-neurones favori vous rappelle que votre anniversaire approche à pas de géant vert, et vous êtes absolument effarée d’apprendre qu’en 2008, vous « embrasserez des projets excitants – mission humanitaire ou adoption ».


Heureusement, quelques loupiottes frétillantes parsèment le chemin, comme la semaine du Fooding, la semaine anglaise, de petits concours blogoculinosphérien, ou un anniversaire royal approchant, accompagné d’un défi culinaire.
Et puis on peut toujours compter sur les cheminots et les étudiants – qui s’ennuient déjà pas mal toute l’année – pour chauffer un peu l’ambiance avec quelques grèves. A partir de mardi soir, le mode autarcie est enclenché, réserves de dvd, livres et purée de noisettes à l’appui, merci de ne pas déranger.
Et puisqu’il faut faire des réserves caloriques – on n’est jamais trop prudent, la route du monop pourrait être envahie par une foule revendicative en délire, une tempête de marrons glacés pourrait s’abattre sur la ville, le bitume pourrait se mettre en grève et se transformer en une masse visqueuse de type sables mouvants contrecarrant toute tentative de ravitaillement, et puisque c’est la semaine anglaise, et puisqu’il y avait ce concours Blog Appétit, et puisque c’est bon, trois recettes à tendance anglo-saxonne :

- des butternut squash muffins courge musquée, mais ça sonne un peu versaillais en français - aux flocons d’avoine, sucre d’érable et noisettes, pour la forme
- des cookies meilleurs tu meurs au pralin et chocolat, recette originale de Sucrissime un peu modifiée, pour le moral. Moelleux, fondants, légèrement croquants sur les bords, pas besoin de dessin
- un chutney sucré salé épicé de courge musquée (re) et mangue, pour pimenter le tout, et un peu aussi pour le concours de bocaux


***
Muffins à la courge musquée aux flocons d’avoine, sucre d’érable et noisettes


100 g de farine
50 g de flocons d’avoine
50 g de sucre d’érable
½ sachet de levure
1 bonne pincée de fleur de sel
50 g de beurre fondu
1 oeuf
12,5 cL de lait
150 g de courge musquée cuite et grossièrement écrasée (ou potiron, potimarron, ou autre cucurbitacée de saison)
1 cc de cannelle (ou 4 épices mais point trop sinon ça écrase l’érable, pourtant solide dans son genre)
25 g de noisettes

Préchauffer le four à 180°
Torréfier les noisettes 15 minutes, laisser refroidir et les concasser.
Dans un saladier, mélanger farine, flocons d’avoine, sucre, levure, sel, cannelle.
Dans un autre saladier, mélanger le beurre fondu, la purée de courge, l’œuf, le lait.
Ajouter la préparation humide à la sèche selon le rituel ancestral de préparation des muffins, mélanger sans excès et verser dans les moules. Parsemer de noisettes et enfourner 25 minutes.
Laisser tiédir sur une grille
***
Cookies meilleurs tu meurs au pralin et chocolat


125g de beurre demi-sel à t° ambiante
100 g de sucre blond
175g de farine
1 oeuf
1 càc de levure
90 g de chocolat noir concassé
60 g de pralin

Préchauffer le four à 180°.
Crémer le beurre et le sucre. Ajouter l'oeuf, puis la farine et la levure. Mélanger jusqu'à ce que la pâte soit homogène. Ajouter le pralin et les pépites de chocolat. Former des boules de pâte et les écraser légèrement.Déposer les boules sur une recouverte de papier sulfurisé
Cuisson : 9 minutes.
Laisser refroidir sur une grille


***
Chutney épicé courge musquée mangue


250 g de chair de courge musquée
250 g de mangue (pas trop mûre)
1 oignon
15 cL de vinaigre de vin
15 cL d’eau
80 g de sucre blond
1 cc de cannelle
1 cc de gingembre en poudre (pas de racine fraîche sous le pied)
1 cc de curry fort en poudre – plus ou moins, selon
1 cc de graines de moutarde
8 grains de poivre noir

Couper l’oignon, le potiron et la mangue en petits dés, les mettre dans une casserole. Ajouter le vinaigre, l’eau et le sucre, mélanger et faire chauffer à feu vif une vingtaine de minutes. Baisser le feu, ajouter les épices et laisser mijoter une heure environ, jusqu’à obtenir une consistance confituresque.
Verser dans des bocaux.

A déguster seul avec du pain en apéro, ou, comme le dirait mon double marketeur : "à la fois doux et épicé, ce chutney étonnant et détonnant alliant saveurs sucrées et salées accompagnera à merveille vos viandes blanches et fadasses"


Aucune idée de la durée de conservation une fois mis en bocal, mais puisque c’est très bon, ça devrait pas être un problème.

***
Ah et puis il y a aussi ce concours de photos culinaires. Après moult hésitation et concertation, le choix se porte sur celle-ci, Orange curd au pavot et bouchée fondante pomme amande :

(réalisée avec un compact automatique de base, et vietnamien) Pour respecter le règlement, il faut expliquer comment le pourquoi du comment de la photo. C'est bien simple, comme pour toutes les photos, je cherche un moyen d'avoir un peu de lumière et d'éviter d'avoir toujours en arrière-plan ces arabesques métalliques charmantes mais vraiment redondantes : je me place donc toujours au même endroit, sur la machine à laver, et cherche acrobatiquement un cadrage adéquat. Pour celle-ci, je revenais d'une virée chez Zara Home avec de chouettes cuillères, et voilà.

mercredi 7 novembre 2007

Comment dit-on "Tronche de Cake" en anglais ?

Avertissement liminaire :
1/ Toi qui t’es retrouvé là en tapotant « Tronche de cake traduction anglais » sur Google, passe ton chemin
2/ Toi qui cherche une recette de cake anglais, passe ton chemin aussi
Sur ce, je reprends, pour les deux du fond : après "Le Cookie fait des bébés macarons au pandan toute seule", "Le Cookie a trouvé l’Amour, des macarons au pandan, et bien plus encore".

Une fois n’est pas coutume, ce sera un post court – mais d’une folle intensité – car les mots me manquent, un peu.
Une seconde fois n’est pas coutume, je reste coite, bouche bée, ou, comme me le susurre le trombone des synonymes Word, aphasique … car j’ai rencontré la pâtisserie de ma vie. Point de badinage : entre elle et moi, c’est du sérieux. Je l’aime à mourir, comme un fou, comme un roi, comme une star de cinéma, elle me fait tourner la tête, j’irais chercher son cœur si elle l’emporte ailleurs, with or without her, je vais et je viens, entre ses reins – ok, dérive. L’idée centrale est saisie.

De retour sur le plancher des vaches parisiennes – qui n’ont vraiment, mais vraiment rien à envier aux vaches londoniennes – je lance donc, en parallèle de ma quête intense d’une idée excessivement lucrative, un nouvel appel à votre bon cœur en vue d’une expatriation imminente, ou le-plus-tôt-genre-demain-matin-je-suis-libre-serait-vraiment-le-mieux, afin de retrouver l’élue de mon cœur, au cœur de cette contrée gastronomiquement tourbillonnante qu’est Londres.

Elle m’a tellement fait tourner la tête que j’ai à peine eu le temps de dire I do que l’équivalent du salaire du Prime Minister était parti. En resto, bars, pub, fringues, macarons au pandan, pâtisserie au thé bleu, mais aussi en crème pour les mains au caviar, millionnaire shortbread, et autres plaisirs minuscules. Bon, donc l’amour et l’eau fraîche : pas exactement le trip londonien.
Considérant la mine de chutney avarié de mon relevé bancaire, j’ai quelques doutes sur la réaction de Suzanne, ma conseillère financière adorée, concernant cette inconscience passagère.

Mais comment résister à l’appel d’une ville où les macarons au pandan sont en vente libre, où le thé bleu n’est pas un rêve, et où l’agar a une rue à son nom ?

Certes, je pourrais me diriger directement vers le Japon, mais je ne saurais me passer plus longtemps de mes deux très chers amis, Marks et Spencer, que j’ai retrouvé avec une émotion non dissimulée (légère brillance de la pupille devant les rayonnages de crumpets, hot cross buns, scones, muffins, cupcakes, cookies, shortbread, flapjacks …) après tant d’années de séparation forcée.

Je ne sais pas trop comment décrire les charmes de cette incohérence alimentaire où, à trois inches d’intervalle, c’est l’embarra ahuri entre healthy organic detox prend soin de toi ou triple chocolate extra rich super fat. Je n’ai pas choisi mon camp, j’ai joué l’agent double, voire triple.

Mais revenons à mon mouton chéri : Yauatcha.

Un nom qui promet monts et merveilles (comment ça, ça vous parle pas ?), qui dit japonnais, qui dit miam O’miam, qui dit ouh là, ça va être tendu de goûter vingt pâtisseries, quinze parfums de macarons et dix chocolats en une seule visite – sans parler d’argent, ne soyons pas vulgaire, et puis l’amour est aveugle, c’est bien connu de Suzanne – cf. plus haut. Jamais encore n’avais-je goûté de pareilles choses. Des choses, bien plus que des pâtisseries : de petites merveilles et de grands bonheurs, tellement belles et bonnes qu’elles ont le goût de l’évidence.

Derrière tout ça, un homme venu de la planète France : Stéphane Sucheta, un dieu vivant. Plus d’infos à son sujet chez notre ami Christophe, où l’on apprend entre autre qu’il a une prédilection pour l’humour noir ...

A mes humbles palais et yeux, ses pâtisseries sont simplement parfaites : admirables d’esthétisme, d’une élégance sans fioritures, novatrices dans les parfums, les textures et leurs alliances, la saveur de chaque produit resplendit modestement dans une architecture nette et précise, sans être écrasée ni par le sucre ni par les préparations.

Tout ça se met en place naturellement, comme sur un nuage, si bien que même si le goût s’attarde longtemps en bouche, c’est comme si l’on n’avait pas encore commencé.
Ce qui nous donne, concrètement, un mont-blanc au kumquat aérien, étonnant, plein de surprises … ou cette alliance de chocolat et de yuzu (citron japonais) subtilement explosive.

Aurais-je omis de mentionner qu’on trouve, chez Yauatcha, des macarons au pandan ? Trop éberluée par cette divine apparition , j’ai omis de noter la foultitude d’autres parfums.

Ça s’appelle un coup de foudre, j’en tremble encore. Je me serais presque gardée de dévoiler ma découverte, m’enfin … en pianotant un peu, je me suis aperçu que l’adresse n’était pas exactement le secret le mieux gardé de la Cour royale : une étoile Michelin et 43ème au classement des 50 meilleurs restaurants du monde en 2005 … (car c’est en fait principalement un resto de dim sum, forts alléchants d’ailleurs)

Tout ça pour dire : si vous êtes de passage à Londres, courrez, volez, et réservez. J’ai évidemment voulu y retourner pour goûter d’autres délices inconnus, mais me suis entendue dire par de charmantes serveuses qu’il y avait quatre heures d’attente pour le tea and cakes si je n’avais pas de booking.
Je me suis maudite dix bonnes minutes en grimaçant et tournant en rond sur moi-même (chacun son truc), et puis je me suis résignée à emporter une petite boîte de deux chocolats, un peu comme un souvenir, un peu parce que rien que deux chocolats t'as intérêt à les savourer bien longtemps tellement ça fait quand même 4 £, et un peu aussi parce que la boîte est comme un écrin à bague de fiançailles, et que c’était un peu comme si Yauatcha et moi, on était uni par des liens sacrés.

truffes mascarpone camomille et cactus citron vert

Sachant qu’il va très bientôt être possible d’être là-bas en 2h15, et qu’une pâtisserie coûte 4,70 £, à combien s’élèvera le montant de mon prochain découvert ?
Yauatcha
15-17 Broadwick Street, SW1 (Soho)
Métro Oxford Circus 020-7494 8888



Pour finir, quelques photos de Borough market, le plus vieux marché de Londres, très touristique mais bien agréable tout de même, où l’on se rend compte qu’il existe du vrai fromage en Angleterre, des légumes vendus autrement qu’en sachet individuel, et qu’on pourrait bien se passer de Paris quelques temps.