dimanche 28 octobre 2007

Une brève histoire, des prix et un au revoir : macarons vanille pandan

Une heure de gagné grâce à l’hiver : c’est toujours ça de pris, et ça me laisse une heure toute entière de plus pour m’étendre de long en large et en travers de ce post.

Au sommaire, donc, ce dimanche : une brève histoire du macaron au pandan, des remerciements et des compliments, et un petit au revoir


Le macaron au pandan : sa vie, son oeuvre

Le macaron au pandan est le samedi 27 octobre 2007, et décédé ce même jour dans d’atroces souffrances.
Désiré et espéré depuis la nuit des temps, voire au moins trois mois, il est le fruit de l’amour et de l’acharnement thérapeutique, la maman chérissant l’idée de pouvoir un jour tenir dans ses bras une petite chose à croquer, ronde, et vert fluo – le lecteur à l’esprit vif se dit qu’elle aurait pu se contenter d’un télétubbies, mais, comme c’est un lecteur, il continue à lire sans interrompre, merci.

La maman du macaron au pandan n’avait pas inventé le fil à couper le beurre - ni le panier à linge sale d’ailleurs - mais elle avait la conviction que, si la nature était bien faite, le macaron et le pandan devrait naturellement être unis par des liens sacrés ; et puisque ce n’était pas ceux du mariage, ni ceux de Pierre Hermé, elle décida de faire des bébés toute seule.


Le ciel semblait lui indiquer de se raviser, et de se contenter de nourrir une douce rêverie, mais son désir irraisonné était tel qu’il tournait à l’obsession, et que son esprit vagabondait sans cesse : les passagers du métropolitain lui apparaissait sous forme de gros tas de poudre d’amande envahi par les mites alimentaires, les immeubles étaient des montagnes de blancs en neige, et elle se réveillait en sursaut, imaginant périr submergée dans un océan de ganache au pandan dont elle ignorait encore la composition.

Elle n’était plus en mesure de prendre des notes en cours, l’insoutenable légèreté de l’être marketing ne lui arrachait plus un gloussement, même lorsque des intervenants de qualité au moins label rouge déclarait que Mme Michu était perdue lorsqu’on transformait du jour au lendemain sa crème basique vieille peau en make me shine, et que « ne vous inquiétez pas, c’est très intellectuel mais vous pouvez comprendre : la promesse de marque de N., c’est de respecter sa peau, son corps, et soi » (véridique). Rien n’allait plus. Si elle ne voulait pas compromettre un peu plus sa santé mentale, il fallait qu’elle agisse.


Elle n’avait pas de robot, mais un bon batteur, pas de poche à douille, mais une chouette cuillère à café, pas de tamis, mais une superbe mini passoire à thé, ni de plaques à pâtisserie, mais, contre vents et marrées, elle décida de se lancer. Contre vents et marrées, car les conditions climatiques n’étaient pas favorables à la réalisation de son dessein.

En effet, en période froide et humide, la population arbore généralement une triste mine, du genre de celles qui font, le matin, hésiter entre se déguiser en GI à l’aide d’un camouflage intégral à base d’anticerne - ce qui n’arrange rien puisqu’il est bien connu que l’anticerne, c’est juste bon pour augmenter l’effet cocker en mal de croquettes – ou en cambrioleur, grâce à une cagoule digne des plus belles années d’école primaire.

Et bien c’est idem pour les macarons ; l’humidité, c’est pas trop leur délire : les macarons de la première fournée s’étaient donc subrepticement travestis en amarettis – très savoureux au demeurant, mais ce n’était pas exactement ce à quoi la pauvre fille s’attendait après des heures de lutte. A ce moment, elle se dit in peto – mais un peu en bougonnant quand même - qu’il était temps de reconnaître les limites de son projet de progéniture. D’arrêter. Tout. Partir.

Mais en fait non. Car, quelle ne fut pas sa surprise quand, le lendemain, elle sortit du four sa deuxième fournée de rejetons, qu’elle avait placé au frais toute la nuit, ayant d’autres chats à fouetter. Une bonne nuit de sommeil leur avait fait le plus grand bien et, mutatis mutandis, ils étaient devenus ce qu’ils devaient être : ronds, lisses, arborant fièrement une collerette à faire frémir Louis XIV.

La suite de l’aventure coule de source : rassérénée par son début de réussite, notre protagoniste ne fit ni une ni deux, empoigna du chocolat blanc, de la crème de soja et du pandan, et concocta sa ganache. Après une attente conséquente, elle assembla son rêve devenu réalité, patienta encore, et observa fièrement sa famille recomposée.

Le mot de la fin
: elle vécut donc heureuse et eut quelques enfants, mais ses petits étaient si bons qu’ils ne firent pas long feu, d’autant que l’ogresse du château d’eau était passée par là. Elle avait mené à bien son idée fixe, et pouvait désormais porter sa maniaquerie sur d’autres projets.


Ok, donc ça, c’est fait.
Maintenant, il me faut remercier chaudement Aurélie de m’avoir décerné un prix fabuleux, celui du Thinking Blogger Award qui, comme elle le dit elle-même, est un prix bidon qui ne sert absolument à rien, mais qui fait quand même bien plaisir, notamment à l’approche de cette période de l’année couramment dénommée «novembre, t'es mieux dans ta chambre», durant laquelle la meilleure chose à faire est d’attendre que le temps passe, que Noël arrive, que le travail se fasse tout seul, en savourant tranquillement l’arrivée de nouveaux épisodes de Desperate Housewives.
A mon tour donc, de décerner le prix à 5 blogs que j’aime, sur la base de zéro critères objectifs, soit un petit mélange de mort de rire et de miam :

- Loukoum de Beau à la Louche (donc j’ignore le prénom et ça commence à me perturber quand même pas mal) : parce que c’est un des premiers blogs que j’ai connu, "il y a bien longtemps dans une galaxie lointaine, très lointaine", qu’elle me donne presque – presque – envie d’aller à Strasbourg, et que je me demande, mi curieuse mi jalouse : mais comment elle fait pour gérer sa vie, son œuvre et ses recettes ?
- Aurélie (PAS LIGNAC et ça c’est vraiment chouette) de Set de table (5 fois médaillée, wouaou) : parce qu’elle a des problèmes de four, de coulant au thon et de danse du ventre, mais pas que.
- Marion d’ Il en faut peu pour être heureux : parce ça a l’air bon et qu’elle a l’air chouette, en plus d’avoir du vrai pandan.
- Framboiz de Feuille de chou – qui me fait d’autant plus rire qu’il faut trépigner des semaines et des mois pour lire une nouvelle aventure, et qu’elle a des rêves aussi fous qu’aimer les Oréos
- Anaik de Le Confit c’est pas gras : pour le titre, les textes, les recettes, et parce qu’atteindre ce degré de concision, ça m’en bouche un coin.

Le petit copier-coller de rigueur : « Si tu fais partie d'une des personnes récompensées, et seulement dans ce cas, publie un article dans lequel tu feras apparaître à ton tour 5 blogs que tu apprécies beaucoup, avec les liens vers ces derniers pour que l'on puisse les visiter. Fais un lien vers ILKER pour que l'on puisse savoir d'où vient ce prix. »

Bon, là, on touche à la fin. Pour conclure, donc, un petit au revoir puisqu’il n’y aura pas de post la semaine prochaine : je pars quelques jours outre-manche faire semblant que mon boulot se fait tout seul ici, et vérifier le bon état de marche d’une rouquine même pas anglaise. (quoi, j'avais pas besoin de le dire, personne aurait remarqué mon absence, c'est ça que tu veux dire ???)


***
Macarons vanille pandan


Pour 36 macarons – théoriques : comme le lecteur à l’esprit toujours vif l’aura compris, mieux vaut aller directement à la recette originale de Pure Gourmandise

Ganache au pandan

170 g de chocolat blanc de couverture
120 g de crème de soja
15 g d’extrait naturel de pandan

Attention, le chocolat blanc et la crème de soja n’apprécient pas du tout les coups de chaud, d’où :
Faire fondre le chocolat blanc au bain-marie – à feu très doux, et sans que le fond du récipient ne touche l’eau.
Hors du feu, ajouter la crème de soja et le pandan. Bien mélanger, laisser refroidir et placer au frais jusqu’à durcissement – au moins deux heures.

Coller les coques deux à deux avec une noix de ganache au pandan et placer les macarons au frais une journée.
Engloutir.

Note d’importance primordiale : la ganache au pandan se laisse plus que parfaitement déguster toute seule ou tartinée, pour le plus grand bonheur des membres du Club des Adorateurs du Pandan.

samedi 20 octobre 2007

Pour le régime spécial de week-end : tarte au chocolat et aux marrons à l’ancienne

Trois jours plus tard, ça continue … Quoi ? Les grèves. Fidèle à ma nouvelle devise ("restons calme", cf. previous post), je vois les choses du bon côté : la tension continue de monter à mesure que la température baisse – 1°C, m’indique un de mes nombreux orteils, la barbarie urbaine, d’ordinaire plus ou moins cantonnée au métro, se propage dans les rues, la guerre des vélib’ aura bien lieu … Peu m’importe, tout ça glisse sur moi telle la goutte d’huile sur la poêle en téflon.

Tout ce que je retiens, c’est que les grèves permettent de se barricader tranquillement chez soi, en toute impunité, puisque soit les cours sont annulés, soit on a un alibi imparable pour ne pas se bouger, soit les deux.
J’ai à peine émis un froncement de sourcil quand le panneau de la RATP m’a lumineusement suggéré - en vain, faut pas pousser non plus - une attente de 39 minutes pour me rendre au séminaire de gastronomie moléculaire (sur la crème pâtissière : si quelqu’un y était, un petit débriefing est le bienvenu).

Attendre vingt-cinq minutes un taxi ? de la rigolade.
C’est vrai que c’est assez drôle, en fait, de devoir supplier les chauffeurs de taxi – libres, d’après la signalisation communément admise – de bien vouloir : ralentir, daigner détourner le regard vers vous, petite chose à demi congelée, puis écouter le libellé de la destination. Là, c’est la vengeance du chauffeur de taxi : il est tout-puissant, il a droit de vie ou de mort sur le déroulement de votre soirée, qu’il exprime en toute simplicité, d’un rapide mouvement de menton. Une fois embarquée, le soulagement et la chaleur retrouvée sont tels que vous vous surprenez à écouter sans faillir ledit chauffeur se féliciter de la qualité de sa grosse voiture, de la médiocrité de sa progéniture, ou autre petit aphorisme impromptu sur le divorce des Sarkozy.
Vingt-cinq euros plus tard – calme, on a dit – j’y suis. Où ? A l’inauguration du Salon du Chocolat. [Avertissement : les lignes risquent de sonner un poil strass et paillettes. Une fois n’est pas coutume, ça passe ?]
Peu importe, en fait, rien de magistralement transcendant, sauf si on se plaît à entendre Laurent Boyer ponctuer le défilé des robes en chocolat (plutôt en robes qu’en chocolat d’ailleurs) de « soi-même » : première fois, je m’étonne (« Mesdames et Messieurs : Jean-Paul Hévin, soi-même ! » ??), deuxième fois, ça me picote les gencives (« Mia Fraye, soi-même »), troisième fois (« Christian Karembeu, soi-même »), je voudrais pouvoir diriger le jet de la fontaine de chocolat sur lui pour le faire taire.
Mais je me retiens, mon attention temporairement détournée sur l’apparition soudaine de Michalak (entendons-nous : pas le champion de rugby, le champion du monde de pâtisserie, soi-même, officiant au Plaza Athénée), là, à vingt-deux centimètres de moi, qui me dit bonjour, l’air de rien.
Conclusion de la soirée : moins d’un demi cm² de chocolat Aoki avalé, rien bu, quasiment rien vu. Oui je sais, ça fait un peu
(ça me fait beaucoup rire, mais ça se discutte)

Soit. Mais comme la Porte de Versailles, ça me fait pas peur - reporter sans frontières, c’est moi – j’y retourne demain avec à la clef, je l’espère, une photo d’intérêt majeur (whouaouh, quel suspens insoutenable).

Bref, revenons à l’actualité immobilisée. Que la grève continue, ou pas, ce que j’en retiens, c’est que ces histoires de régime spécial de retraite me permettent d’instaurer un régime spécial de week-end, contre le froid, et pour les réserves énergétiques, avec une tarte au chocolat et aux marrons, à l’ancienne.

En marketing, on aime bien dire « à l’ancienne ». D’abord, parce que ça fait quelque chose à dire. Aussi, parce que ça fait vrai, et Mme Michu aime bien ce qui est vrai : le terroir, les nappes vichy, le roquefort et les chips, ça la connaît. Du coup, elle dégaine sa carte.
En bonne futur (ex) marketeuse, je vous vends donc ma tarte au chocolat et aux marrons à l’ancienne comme il se doit, ce qui pourrait donner un truc comme ça (rayer les mentions inutiles) :

« Élaborée par une équipe solidaire d’artisans à l’écoute de la terre/une étudiante gelée à l’écoute de son estomac à partir des meilleurs ingrédients, cette tarte au chocolat et aux marrons transformera votre pathétique dessert quotidien en un instant de volupté, d’émotion et d’euphorie.

Joyeuse onctuosité du beurre d’Isigny mêlé au beurre à la fleur de sel de Guérande, marrons d’Ardèche rieurs et savoureux rehaussés d’une touche ensoleillée de vanille de Madagascar, sombre puissance et richesse d’un chocolat noir 70% pur beurre de cacao, nous avons travaillé sans relâche/mouliné à la vie à la mort pour vous offrir un pur moment de sensation/kiff.
En effet, nous ne nous sommes pas contentés d’une vulgaire purée de marron en boîte C.F ou en sachet de chez Mr P., deux grands hommes au demeurant ; bien au contraire, notre volonté de vous satisfaire/incapacité à trouver de la purée toute faite nous a conforté dans l’idée de confectionner nous-même notre purée de marron, dans le plus grand respect de la tradition paysanne de Paris, grâce à ce formidable outil que l’on nomme couramment un presse-purée.
Témoins de ce travail artisanal, les brisures de marrons permettent de ne pas tomber dans l’uniformité lassante de la parfaite homogénéité et participent à la splendeur transcendante de ce met, en tout point opposé à une beauté classique à la …
- compléter avec le nom de l’actrice à qui vous avez envie de faire manger son mascara.
Nous vous épargnons les détails concernant le délice de la pâte sucrée, dont la réputation n’est plus à faire.
C’est ainsi que nous sommes parvenu à ce résultat merveilleux, comme une grande vague de doux réconfort. La simplicité revendiquée »


Voilà, presque tout est vrai.
Vous achetez ?
Note : ma tarte à l’ancienne est carrée, et puis ?

***
Tarte au chocolat et aux marrons à l’ancienne


Une pâte sucrée/sablée
280 g de marron au naturel
70 g de sucre
1 cc de vanille de Madagascar en poudre
100 g de chocolat noir 70%
70 g de beurre (moitié beurre doux d’Isigny, moitié beurre à la fleur de sel)

Préparer la pâte dans les règles de l’art. Préchauffer le four à 180°.
Foncer un moule à tarte – ou pas – beurré. Piquer la pâte et placer 30 minutes au frais.
Couvrir de papier sulfurisé, remplir de pois chiche et faire cuire 15 minutes. Retirer les pois chiches et le papier et remettre au four une dizaine de minutes, jusqu’à ce que la pâte soit dorée.
Pendant ce temps, réduire les marrons en purée pas au top de son homogénéité, pour le côté la vie, la vraie. Ajouter le sucre et la vanille.
Faire fondre le chocolat au bain-marie. Ajouter le beurre.
Hors du feu, ajouter la purée de marron. Bien mélanger et verser sur le fond de tarte. Lisser la surface en laissant quelques irrégularités, symboles d’authenticité.
Placer au frais quelques heures.

Déguster au coin du feu, ou du radiateur, selon.

dimanche 14 octobre 2007

Il fait froid, restons calme : orange curd au pavot, bouchées fondantes pomme-amande, gâteau figues, poires, pistaches

Je sais pas vous mais, à mon humble avis, le monde est un peu froid ces temps-ci. Objectivement et météorologiquement, j’ai froid, mais c’est surtout un grand vent de froid dans le dos qui claque sur moi - aïe - quand je jette un bref coup d’œil - aïe bis - sur mon agenda ministériel. Ok, le second point manque tendancieusement d’objectivité, mais 1/ on ne va pas retomber dans ce ridicule débat de l’objectivité, la vraisemblance et tout le bla bla ; un tas de gens au top de leur puissance intellectuelle a déjà planché sur le sujet pour parvenir à la conclusion que l’objectivité, c’est comme le concept de poules à dents, c’est pas demain la veille qu’on la croisera sur son chemin, 2/ j’ai vraiment la désagréable impression d’avoir une foultitude de choses à faire dans un temps qu’on pourrait qualifier de scandaleusement limité.

N’étant pas dans l’immédiat une superstar en possession d’une villa en milieu tropical, spa included, et d’une paire de lunettes assortie – modèle mouche ou aviateur, au choix – pour me ressourcer et faire un break, je me contente de m’emmitoufler de plusieurs couches de tissus divers et de faire face et front à ce monde hostile, en adoptant une attitude de calme et d’apesanteur toute lagerfeldienne.

Voilà donc comment, en vrac, tout pourrait très bien se passer, si ce n’était … mais aussi pourquoi, en vrai, tout va bien se passer :
- la révolution Orange, ou comment ruiner une image de marque en trois semaines d’attente de mise en service d’une très simple ligne internet, cinq appels au « service » assistance technique, soit plus de trois heures à 0,34 centimes la minute, une quinzaine de répétition de mon numéro de client (d’abord délicatement pianoté sur le clavier, franchement tambouriné un peu plus tard, puis férocement claironné - ce qui pourrait aboutir à une fanfare complète, si on y pense) et un nombre indécent de paroles vulgaires diverses adressées à mes douze interlocuteurs, originaires d’au moins six zones géographiques différentes (plate-forme de Tunisie, du Maroc, d’Afghanistan, mais aussi de Fontenay-sous-bois, de Colombes-la-Garenne, voire, incroyable mais vrai, carrément de Paris).
Le mot de la fin n’a pas encore été prononcé, mais je garde l’espoir d’être prochainement connectée, et reste de glace face à l’adversité technologique.


- la crise de l’immobilier, en partie cause du gel de mes os : jamais de soleil, pas de chauffage et une température avoisinant constamment les -10°, ce qui peut être pris du bon côté si on considère, d’une part, les scènes improbables où je sors de chez moi engoncée dans un col roulé et un manteau fourré tendance pôle nordiste, et découvre avec stupéfaction que les gens normaux sont en débardeur et tongs - même pas brandée ump - dehors ; d’autre part, que je pourrais être une des dernières survivantes lors de la prochaine canicule qui, selon les ouï-dire, serait imminente - et dieu sait que les ouï-dires sont des gens de raison, ce qui démultipliera conséquemment mes chances de succès triomphal dans la vie.


Autre preuve que la persistance paye en matière d’immobilier : certaines personnes de mon entourage trouvent finalement un logis plus que décent, à trois minutes à pied de chez moi si on a l’itinéraire correct en tête, donnant lieu à une pendaison impromptue ressemblant fortement à un squat si ce n’était le champagne dégusté à même le carrelage, très froid lui aussi mais bien sympathique car enfin parisien (ndlr : je n'ai rien contre les carrelages non parisiens, c'est simplement que cette caractéristique permet d'éviter une luxation de l'épaule droite en raison de conversation téléphonique de plus de trois heures par jour avec la locataire dudit carrelage).

Bon, je pourrais continuer sur les causes d’inquiétude assez longtemps (la fuite du temps, la montée du niveau des eaux, la hausse du prix du beurre, l’hostilité de mes cheveux le matin, les cours de stratégies d’innovation qui m’empêcheront d’assister au séminaire de gastronomie moléculaire de jeudi prochain), mais préfère insister sur les motifs de réjouissance, notamment en matière culinaire, puisque tout ce manque de chaleur humaine et physiologique m’a conduite à me réchauffer sur quelques voies inexplorées, à savoir :
De l’orange curd au pavot, accompagné – ou l’inverse – de bouchées fondantes pomme-amande, et d’un gâteau poires, figues et pistaches, tout trois fortement conseillés en cas de grand froid.

Remerciement au passage de la reine Mathilde pour être une fois de plus à l’origine de l’idée de cet orange curd au pavot, puisqu’il faisait partie du pack cadeau « aménagement imminent en milieu urbain ». Je ne sais plus trop d’où m’est venue l’idée, mais une chose est sûre : recette à faire et à refaire les yeux fermés – mais pas trop. Doux, acidulé, crémeux, léger croquant et amertume du pavot : à tartiner sans modération. Les petites bouchées ne sont pas mal non plus, fondantes et chaleureuses à souhait. Ok, c’est encore une adaptation d’une recette de muffin et j’aurais pu les appeler des mini-muffins, so ?

Quand au gâteau – sur base de gâteau au yaourt qui a fait ses preuves, il est spécialement conçu pour tenir chaud au corps – mais pas que. Figues, poires, pistaches, fleur d’oranger, miel et huile d’olive : en un mot, grequisant. J’ai été baptisée à l’huile d’olive, et n’ai goûté d’autres huiles que très récemment.
Chez moi, l’huile d’olive - grecque ou rien, c’est pour tout, sur tout et partout : cuisine, cheveux, corps, maux de gorge, maux de pieds, et gâteaux, évidemment. (si je mentionne que mon grand-père met de l’huile dans son café le matin, ça prend peut-être plus de sens) L’association fonctionne plus que bien, dangereusement bien, même.

Bref, voilà les recettes, mais avant, un autre motif de réjouissance : le Salon du chocolat le week-end prochain, où l’on pourra retrouver Pilêo, une innovation de rupture à tomber ou je ne m’y connais pas, que l’on peut également apercevoir dans le dernier Elle à Table.

Sur ce, restez calme, tout va bien se passer.

***
Orange Curd au pavot

Pour deux petits pots (cf. photo)
1 dl de jus d’orange (1 orange ½ dans mon cas)
zeste de 3 oranges non traitées - ou traitées mais alors après venez pas vous plaindre
75 g de sucre de canne
15 g de graines de pavot (1cs environ)
2 œufs
50 g de beurre
15 g de maïzena (1cs)

Laver et sécher les oranges, puis les râper pour en prélever le zeste. Si vous êtes un prolo de base/pas encore toque étoilée et que vous n’êtes donc pas en possession de cet ustensile formidable qu’est un zesteur (si si, ça existe, tout comme le séparateur de blanc et jaune des œufs et autres symboles de la modernité culinaire), utiliser une râpe très fine.
A ce stade, vous avez les main plus oranges que votre LiveBox qui fait mine de ne rien comprendre, vous en avez déjà un peu marre, mais vous continuez, rapport au cadeau que vous vous êtes mis en tête de faire à votre copine qui emménage enfin à la capitale et qui a bien besoin de quelque chose à mettre sur sa tartine.
Pressez une orange et demie.
Dans une casserole, mélanger le jus d’orange, le zeste, le sucre, les graines de pavot, les œufs et le beurre coupé en petits morceaux.
Mettre à chauffer à feu doux et fouetter. Lorsque le mélange est chaud, tamiser la maïzena d’une main tout en continuant de fouetter de l’autre – scène assez drôle.
Continuer de fouter – NEVER STOP FOUETTING – jusqu’à ce que le mélange ait épaissit, environ 5 minutes.
Laisser refroidir, verser dans un ou deux ou mille tout petits pots, fermer et mettre au frigo.
Evidemment, lécher la casserole en vous étonnant de ce subtil mélange de saveurs, vous qui étiez persuadée de réaliser ce met dans un élan de cœur purement altruiste - vu qu’en matière de tartinade, vous étiez restée bloquée sur la purée de noisette saupoudrée de pralin, alors qu’en fait, vous vous découvrez une passion déraisonnée pour ce truc.

***
Bouchées fondantes pomme-amande


Pour une trentaine :
120g de farine
30g de poudre d’amande
50g de sucre de canne
5 g de levure (1/2 sachet)
1 pincée de fleur de sel
2 petites pommes (Royal Gala)
50g de beurre fondu
1 œuf
15 cL de lait
½ cc d’extrait d’amande amère
amandes effilées

Préchauffer le four à 200°.
Mélanger la farine, la poudre d’amande, le sucre, la levure et le sel.
Laver et éplucher les pommes et les couper en petits dés.
Dans un autre bol, mélanger le beurre fondu, l’œuf, le lait et l’extrait d’amande, ajouter les pommes.
Verser le mélange humide sur le mélange sec et bien travailler la pâte – donc pas comme des muffins …
Verser la pâte dans des moules à mini muffins et parsemer d’amandes effilées.
Enfourner 10 minutes en surveillant.
Déguster avec l’orange curd au pavot. miam.


***
Gâteau grequisant au poires, figues et pistaches,


qui pourrait être très rapide puisque sur base de gâteau au yaourt – déconcertante praticité du pot de yaourt comme outil de mesure – mais qui se complique concrètement puisque j’ai décidé de diviser les proportions d’un tiers, d’où :
- 1 pot + 1/3 de pot - 166 g de yaourt brassé nature
- 2 pots de farine – 160 g
- 1 pot + 1/3 de pot de sucre de canne – 125 g
- 1 cc bombée de levure chimique – 4 g
- 1 pincée de fleur de sel
- 2 oeufs
- 1 cs d’eau de fleur d’oranger – 5g
- 1/2 pot d'huile d’olive – 50g
- 5 belles figues – 280 g
- 3 petites poires au sirop – 225 g
- 40 g de pistaches torréfiées concassées (10 min à 200°)
- miel

Préchauffer le four a 180° C.
Beurrer un moule – carré pour moi, mais fonctionne aussi dans les moules à cake.
Laver et sécher les figues. Couper la moitié en lamelles fines et l’autre en petits dés.
Idem pour les poires : half lamelles, half dés.
Mélanger la farine, la levure et le sel. Mettre la moitié de poires et de figues coupées en dés dans le mélange de farine (pour ne pas que les fruits tombent au fond).
Dans un grand bol, fouetter le yaourt, le sucre, les œufs et l’eau de fleur d’oranger.
Ajouter en plusieurs fois le mélange de farine, puis ajouter l'huile, délicatement – le tout à la maryse.
Verser dans le moule, placer les lamelles de poires et de figues dessus, parsemer de pistaches et d’un filet de miel.
Enfourner environ 45 minutes - jusqu'a ce que le gâteau soit doré comme les blés.
Laisser tiédir et déguster sans trop attendre.

dimanche 7 octobre 2007

Nuit blanche – ou pas : l’air du temps dans ma cuisine

La Nuit Blanche, tout le monde – surtout les autres – s’est mis d’accord pour dire que c’est une très bonne idée, le genre d’initiative incritiquable sous peine de lynchage Lucky Lukien et/ou jet d’œuf fécondé en place publique. Démocratisation, décloisonnement, découverte, et autres mots en dé : joie républicaine. "Une vision généreuse et accessible" où "l’art contemporain se mêle à la ville et génère un espace-temps singulier où chacun est invité à circuler, redécouvrant son quotidien transformé ou explorant des lieux inattendus."
Sauf que redécouvrir mon quotidien transformé, en vrai, ça donne un espace-temps singulier, mais pas tant que ça. J’observe, écoute, et constate : "vazy on bouge où c’est d’la merde/vazy ch’ais aps oim vazy", agrémenté d’une sympathique fragrance malt-kébab, le tout enveloppé d’un fond sonore douloureux de percussions.
Je crois qu’ils n’ont pas bien saisi toute la générosité offerte.

Rien de particulier jusque là, donc, un samedi soir ordinaire sur la terre de Châtelet. Conquérante, je poursuis, en quête de l’installation d’un point d’interrogation lumineux en lévitation dans l’église Saint-Paul, (ndlr : oeuvre du fameux artiste autrichien Robert Stadler) qui fait très subtilement signe aux interrogations métaphysiques de tout un chacun, surtout celles des autres.
Bon, ben en fait c’était tellement métaphysique que je l’ai pas saisi, le point – d’autant que je le cherchais à Saint-Eustache.
Passons sur l’épisode de liesse populaire post rugby ayant eu pour fâcheuse conséquence de plonger mon téléphone dans un coma temporaire mais profond (note : il va falloir assez vite arrêter ce delirium à propos du rugby, j'ai bien intégré l'idée que c’est in mais là ça commence à être juste lourd, du genre ma mère qui m’appelle pour me demander A MOI le résultat du match).


Enfin bref, la Nuit Blanche, je dis non. Ça fait cinq ans que tout le monde est content d’y croire, cinq ans que tout le monde sait que ça ne fonctionne pas, cinq ans que c’est un prétexte à état d’ivresse aggravé sur la place publique. J’admets cependant l’hypothèse que d’autres citadins mieux informés/moins découragés aient pu y faire l’expérience d’une métamorphose de leur univers sensoriel – commentaires ouverts.


En revanche, je dis oui à la stimulation de ma créativité culinaire, qu’elle vienne de l’art contemporain ou de Elle, où j’ai pu récemment lire que « l’air du temps est décidément au Prozac sur imprimé » (ie : happy face sur ta robe-pull gris-violet), que « l’idée est de superposer les ambiances », de mêler gaiement les couleurs explosives et de jouer avec les matières, et qu’il est impératif de se « laisser aller aux combinaisons les plus anticonformistes ».

Rassurée par cette caution spirituelle, je me suis lancée vers des horizons colorés et rebelles avec :
* Les verrines de l’Ere du temps : salade de dés de poivron, pomme, carotte, achar, chips de pomme au pandan, qui transcendent grave,
* Les tartelettes matcha-marron, qui transcendent pas mal quand même,
* Et puis des petits muffins chocolat blanc-purée de noisette, qui transcendent plus le palais que la créativité culinaire, mais qui sont vraiment extra et qui trouvaient bien leur place dans la thématique installation contemporaine.


Au commencement était l’idée d’une crème fouettée salée au pandan. Mr This m’avait affirmé au dernier séminaire de gastronomie moléculaire qu’on pouvait faire de la crème Chantilly avec de la crème de soja, je me dis ok, cool, je vais tenter. Je me dis aussi : ok, cool, ça sera encore plus chouette avec du pandan. Puis : pourquoi pas faire une crème fouettée salée.
Jusque là, tout va bien, le raisonnement tient la route, telle la bm 740i de Clive Owen (pas beau) dans Ambush - le vrai faux film de 7 minutes où on fait semblant de pas savoir que c’est la nouvelle génération hybride de pub pour embrouiller Mme Michu, cette pauvre ménagère qui a jamais rien demandé d’autre que de la lessive qui enlève les taches de boue de son gosse, et où la voiture, tellement qu’elle est bien, elle a même pas mal avec mille trous de kalachnikov partout et que Clive, à la fin, il est tellement content qu’il fait un demi sourire en coin.
Sauf que, si la crème monte en 2 minutes 05 avec un bon robot, chez moi ça donne plutôt une explosion crémeuse vert fluo digne d’une grosse indigestion de martien, recouvrant intégralement ma cuisine – et mes cheveux fraîchement lavés, cela va sans dire. Cela dit, si j’avais attendu que la nuit tombe (se lève ?), ça serait très aisément passé pour une installation du circuit Nuit Blanche. Bref.
J’admets que je suis plutôt du genre obstinée, un peu comme tous les grands inventeurs de légende – et modeste avec ça – genre Mr Bic, Mr L. da Vinci (mais si, celui qui a inspiré le Code du même nom) ou l’autre Dyson qui a inventé l’aspirateur sans sac pour CSP+++ – voilà pour celles qui voulait savoir ce qu’on apprend d’autre, en cours de stratégie d’innovation – mais, comme dit le grand sage, "sache souffrir la matérialité bornée de ton champs des possibles mondain et te résigner à la spirituelle espérance d’une âme charitable te glissant discrètement un Kitchen Aid sous ton oreiller". J’ai donc abandonné provisoirement l’idée de la Chantilly au soja, la Chantilly tout court d’ailleurs.

Mais je voulais quand même un truc au pandan qui se pose au-dessus de ma salade de dés sucrée salée épicée, parce que je voulais des verrines, et que les verrines c’est bien connu, il faut quelque chose on the top sinon c’est juste naze. D’où les chips de pomme au pandan, subtil rappel de la pomme de la salade, harmonie discordante de la fraîcheur du pandan. Top.

Bref. Voilà, globalement, pourquoi tout ça - muffins hors-jeu - est dans l’ère du temps – ie : mix et contrastes d’ici et d’ailleurs, voire de là-bas, choses qui ne font pas forcément sens ensemble a priori, voire qui peuvent susciter un haussement circonflexe de sourcil gauche, mais qui en fait, donnent un truc super cool méga hype, même si c’est plus la mode des verrines ni trop du matcha mais que j’ai décidé que si :

- Parce qu’il y a des dés, mais pas que – et que le cube est top "it"
- Parce que c’est sucré-salé, et épicé-citronné, et pandanné pour l’un, matchaté pas trop sucré, crème de marronné limite seuil de saturation pour l’autre
- Parce qu’il y a plein de couleurs, du rouge, du orange, du pomme, du marron, du vert martien, du vert salade, du vert matcha
- Parce que c’est croquant, un peu croquant, pas croquant, re-croquant pour l’un, croquant, fondant, mousseux, puis crousti-fondant pour l’autre
- Parce que c’est bon, beau, interculturel, un peu régressif, un peu ludique, que tout le monde sait que les verrines ça sert à rien, et que rien n’est plus nécessaire que le superflu – surtout quand ça me permet d'utiliser mes nouveaux verres Svalka vaguement Suédois
- Et un peu aussi parce que le gastronome averti perçoit une tension hippopotamesque entre tradition et modernité, entre ma grand-mère et la Nuit Blanche.

Note : si quelqu’un a une remarque à faire sur la constance obstinée de l’arrière-plan des photos, notez que je suis preneuse de tout appartement/trou à rat parisien offrant plus d’une zone de prise de vue lumineuse et/ou n’offrant pas de voisinage de palier grand-maternelle.
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Verrines de l’Ere du temps


– pour 4 verrines

Salade en dés sucrée-salée-épicée :

1 poivron rouge cuit (toujours issu de ma fameuse conserve)
1 pomme
2 petites carottes
1 petite cs d’achar indien
½ jus de citron

Couper le poivron, la pomme et les carottes en petits dés (après avoir lavé la pomme et épluché la carotte, comme il se doit). Ajouter le jus de ciron et la cuillère d’achar, mélanger. Réserver

Chips de pomme au pandan

1 pomme (Royal Gala pour moi)
1 blanc d’œuf
1 cc d’extrait de pandan

Préchauffer le four à 120°.
Mélanger le blanc et le pandan. Laver et couper la pomme en fines lamelles (1mm environ).
Tremper les lamelles dans le mélange blanc-pandan et les déposer sur une plaque recouverte de papier sulfurisé. Enfourner au moins 1h30. Laisser refroidir dans le four.

Service – qui se la pète :
Placer quelques feuilles de salade dans le fond des verres, répartir les dés. Planter une ou deux ou trois ou cinquante chips de pomme au pandan.
Voilà, c’est joli et pas du tout pratique à manger, mais franchement bon.


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Tartelettes matcha-crème de marron

Pour 4 tartelettes

Reste de pâte au matcha – je dirais 1/5ème de la recette initiale qu’on trouve par
125 g de crème de marron C.F (qui a dit c’est quoi "C.F" ?)
1 œuf

Etaler la pâte et foncer 4 moules à tartelettes. Couvrir de papier alu et remplir de pois cassés. Enfourner 15/20 minutes à 160° (normalement 13 minutes à 150° dans un four normal – ie : pas le mien).
Pendant ce temps : séparer le blanc et le jaune. Mélanger la crème de marron au jaune. Monter le blanc en neige ferme avec une pincée de sel. L’ajouter délicatement à la crème de marron.
Quand les fonds de tartelettes sont cuits, retirer les pois et l’alu et répartir le mélange à la crème de marron. Enfourner 15 minutes à 180°.
Astuce découverte le lendemain – d’où aspects divers sur les photos : passer les tartelettes au grill quelques minutes, en vue d’un concept crousti-fondant.


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Muffins chocolat blanc – purée de noisette

Toujours la même recette de base, , avec 50 g de chocolat blanc concassé dans le mélange sec, et une bonne cuillère de purée de noisette au-dessus, en tourbillonnant un peu avec une fourchette.
Fonctionne aussi très bien avec de la crème de marron, du nutella, et autre ingrédient vaguement pâteux et très calorique.