mardi 3 juin 2008

Nouvelles en vrac, babas au Tokaji et assiette méditérranisante

Oyé, oyé. Début de semaine un peu rude, trop peu de neurones réactifs pour mobiliser ma plus belle plume.
Ce sera donc un rapide assortiment de nouvelles fraîches et absolument captivantes. Donc, ces derniers jours, dans le désordre :


- Jean-Claude Van Damme dit qu’il a 360 de QI, mais aussi que « Quand on a des réponses avant des questions, c’est le destin qui frappe à cause de l’énergie de l’être humain qui précède l’humanité de l’énergie ». Et moi je dis : chapeau.

- Incroyable mais vrai, j’ai trouvé des amandes fraîches au détour d’un rayonnage de Franprix.

- J’ai eu une excellente nouvelle, pour changer : j’ai trouvé l’endroit où je serai apprentie l’an prochain. Et tout à coup, en voyant ce chouette labo, ni trop grand ni trop petit, en découvrant l’endroit où se préparent un des meilleurs chocolat chaud de Paris et de fameux Mont-Blanc, mais aussi une nouvelle gamme de pâtisseries pas piquée des hannetons, je m’y suis vue. Yes indeed, pour la première fois, je me suis visualisée en blouse, tablier, et même en charlotte glamourissime, c’est dire.


- Pour fêter ça, un macaron chocolat amer et le livre de François Simon sur Jean-Paul, que je n’avais pas encore eu l’occasion d’acheter. Sauf que la vendeuse japonaise, comme toutes les vendeuses chez J-P, m’a donné un macaron au chocolat normal ; elle a eu de la chance que j’ai été d’humeur radieuse, et surtout que je m’en sois aperçue trop tard, sinon ça aurait été stupeurs et tremblements rue Saint-Honoré. Je veux bien être interculturelle, mais on ne badine pas avec le macaron amer. (Et puis non mais je vous jure, le petit personnel, c’est plus ce que c’était.)

- Je suis tombée sous le charme d’une goutte d’eau.

- J’ai aussi eu une autre nouvelle : la dernière mission de mon stage ne portera plus sur l’assurance-vie. Ça y est, fini les OPCMV, UC, garantie coup dur et autres joyeusetés garanties sans subprimes. Non, ça sera sur … la prévoyance retraite. Je me disais justement qu’il serait temps de commencer à préparer mes vieux jours – et puis un accident de Kitchen Aid est si vite arrivé. Youpi, donc.

- Sydney Pollack est mort. Fait chier.

- Y a plus de saison.

- Je me suis lavé les cheveux. C’est pas que ça soit très rare en soi, car j’ai une moyenne d’ablution capillaire tout à fait honorable. Ce qui est rare, c’est de se laver les cheveux le soir et de se retrouver le matin avec une masse uniforme, plate et huileuse, digne du meilleur MacDo de Limoges (mais j’adore Limoges). Alors l’après-shampoing ultra reflet super plus qui fait les cheveux que même Scarlett elle veut les mêmes, on repassera. Evidemment, il était trop tard pour réparer le carnage, et j’ai donc du affronter toute la journée la lueur de dégoût dans le regard de Fromentin.

- J’ai été à Monumenta 2008 me promener entre les plaques d’acier de Richard Serra. Et c’était, comment dire ? Monumental.

Cinq plaques de presque 20 mètres de haut et 75 tonnes chacune, imperceptiblement inclinées au premier abord, formant un paysage d’une étonnante légèreté sous l’incroyable nef du Grand Palais.

- Yves Saint Laurent est mort. Fait chier.

- J’ai découvert l’objet inutile de la semaine, voire du mois, voire des quelques années à venir, j’ai nommé : l’écosphère.


Quoiquesse ? C’est simple, c’est une boule de verre qui enferme un écosystème complètement indépendant et autosuffisant, un petit monde de crevettes, d’algues, de gravier et d’eau de mer. Ça n’a besoin de rien, sauf d’un peu de lumière, et ça dure comme ça pendant 2 à 3 ans. Combien ça coûte ? Un peu plus de 100€ (pas moi qui l'ai acheté, of course). Et à quoi ça sert ? A rien. Mais j’avoue qu’entre deux slides PowerPoint, je me suis surprise à fixer les gesticulations absurdes des crevettes.

- J’ai fait mes premiers babas. Mais pas au rhum, au Tokaji (cf. après). Tellement bons qu’arrivée à la fin de la recette, j’étais déjà aussi imbibée qu’eux.

- Je suis tombée dans les escaliers hier et ai dévalé quatre marches sur les genoux. Même pas mal.

- Je me suis coupée jusqu’aux entrailles en décortiquant les amandes fraîches. Même pas mal.

***

So, first babas it is.
Le passionnant pourquoi du comment : j’avais une bouteille de Tokaji, un vin de Hongrie liquoreux, vraiment excellent, élaboré à partir de raisins atteints de pourriture noble (un oxymore exceptionnellement savoureux, notez), dont je me demandais comment l’utiliser dans un dessert. J’avais aussi envie de faire des babas depuis un moment. D’où : babas au Tokaji.

Et c’est en errant sur internet que j’ai lu que l’origine du baba vient d’un roi de Pologne, le bon Stanislas Leczinski, qui avait l’habitude d’arroser ses kugelhopf (kouglof?) de rhum ou de vin Tokaji. Bonne pioche, donc : j’adore réinventer un truc vieux de presque trois siècles.
Pour l’histoire du gâteau, après, ça se complique. C'est la guerre des gangs entre baba et savarin, raisins ou pas raisins, moule ouvert ou plein. Bref, j’ai regardé dans le grand livre de pâtisserie de Ducasse. Et voilà :

« Le baba possède une histoire compliquée. Tout est parti d’un kugelhopf aux raisins arrosé de rhum et garni de chantilly, crée au XVIIIème siècle par le roi le Pologne, qui lui donna le nom de son héro de légende préféré : Ali Baba.

Le nom fut rapidement simplifié en baba qui signifie, en polonais, « bonne femme ». Plus tard, Stohrer le modifia en l’imbibant d’un sirop parfumé au rhum, pour qu’enfin l’aîné des frères Julien en reprît la recette. Il supprima les raisins, changea de moule et produisit le baba tel que nous le connaissons aujourd’hui. »
La recette est également celle de Ducasse. Une tuerie.

Mis à part ces babas, une assiette des plus simples et délicieuses, avec du melon légèrement poêlé et quelques tranches de bresaola, trois brins de salade avec des pêches blanches et des amandes fraîches, et une tartine de brousse et figues, surmontée d’une pointe de miel. Si on omet la tempête qui fait trembler les vitres, on se croirait en vacances.


***
Baba au Tokaji et Chantilly

(avec ces quantités, j’ai fait 4 babas dans des ramequins hauts en céramique et 6 dans des moules à mini muffins)
100g de farine
1g de sel
25g de beurre
4g de levure de boulanger
(après un 1er essai, je n’ai mis que 3g de levure de boulanger lyophilisée, dissoute pendant 5 minutes dans 1 cs d’eau tiède)
4g de miel
2 œufs


sirop
50cl d’eau
200g de sucre (Ducasse dit 250 mais moi je lui dit que ça va bien quand même)
½ zeste de citron
½ zeste d’orange

Rhum vieux, selon goût (10cL de Tokaji)
25g de nappage abricot (pas pour moi)
Ducasse dit d’ajouter le rhum au moment du service, mais moi je lui dit qu’on va les faire s’imbiber de Tokaji jusqu’à la moelle, ces babas.

crème Chantilly
20cL de crème liquide
20g de sucre
½ gousse de vanille

confection du baba - mes modifs entre parenthèses
Mélanger tous les ingrédients sauf les œufs : pétrir la pâte et ajouter les œufs un à un. La pâte doit se décoller des parois de la cuve et devenir élastique et lisse. Laisser reposer 5 minutes sur marbre huilé (laisser reposer tout court, ça marche aussi).
(préchauffer le four au minimum, environ 30°)
A la main ou à l’aide d’une poche, répartir la pâte à mi-hauteur dans des moules bouchons de 5cmx5cm préalablement beurrés.
Laisser pousser en étuve tiède (30 à 35°) à hauteur des bouchons. (j'ai mis les moules dans le four préchauffé au minimum puis éteint) La pâte doit légèrement déborder.
Cuire au four à 200-220°, 25 minutes environ en tournant la plaque à mi-cuisson (sinon les babas montent plus d’un côté, ce qui leur donne l’air de hurler à la lune, enfin je me comprends). La durée de cuisson dépend de la taille, de la couleur et du dessèchement. (à peine 20 minutes pour mon four pourtant pas dans la force de l’âge)
Démouler les babas sitôt qu’ils sont cuits et les faire refroidir sur une grille.

Préparation du sirop et de la crème vanillée
Mélanger tous les ingrédients du sirop sauf le Tokaji. Porter à ébullition, laisser infuser. Hors du feu, ajouter le Tokaji. Plonger les babas dans le sirop chaud mais non brûlant, les retourner avec une écumoire/avec vos doigts fins et majestueux.
Vérifier le trempage : les babas doivent être bien imbibés. Les égoutter sur une grille. (de mon côté, je les ai laissé s’imbiber toute la nuit dans une boîte hermétique, et les ai égouttés avant de servir)
Fendre la gousse de vanille en deux dans le sens de la longueur, la gratter pour récupérer les graines et mélanger celles-ci à la crème. Fouetter avec le sucre pour obtenir une crème au trois-quarts montée (consistance dite « baveuse »).

- Note pour la crème chantilly : la chantilly est capricieuse, surtout avec les crèmes de supermarché, et dieu sait – enfin, surtout moi – que rater une chantilly est agaçant, voire peut vous mettre de mauvais poil pour au moins une demie journée. Il faut absolument utiliser une crème entière – au moins 30% de MG. Pour optimiser les chances de succès, mettre le récipient, la crème et le fouet ¼ d’heure avant au congélateur. Commencer à battre à vitesse faible ; quand la crème devient légèrement mousseuse – à peine une minute, verser sucre et vanille, puis augmenter la vitesse. S’arrêter de battre quand le fouet fait de belles marques sur la crème ; une minute de trop et ça fait du beurre, ce qui nous fait une belle jambe.

Finition et dressage
Dresser le baba sur une assiette et le lustrer de nappage abricot (ou pas).
Devant les convives (ou pas), couper le baba en deux (ou pas) et l’arroser de rhum vieux de leur choix (parce qu’évidemment, t’as une collec de 53 rhum vieux dans ton placard Ikéa). Servir avec la crème vanillée.


***
Assiette melon poêlé bresaola, salade, pêches blanches et amandes fraîches,
tartine brousse, figues et miel

Pour 2
1 petit melon
6 tranches de bresaola
Mesclun
2 petites pêches blanches
quelques amandes fraîches
2 tranches de pain de campagne ou Poilâne
Environ 50g de brousse de brebis
1 figue
huile d’olive
miel
sel, poivre


Dans les assiettes, répartir un peu de mesclun.
Laver, retirer la peau et couper les pêches en tranches. Décortiquer les amandes et les tailler en julienne. Disposer les pêches et les amandes sur la salade.
Faire griller le pain. Laver et sécher la figue et la couper en six. Dans un bol, écraser la brousse à la fourchette et assaisonner. Répartir sur les tartines, ajouter les tranches de figues. Verser un peu de miel et donner quelques tours de moulin à poivre. Réserver.
Couper le melon en tranches assez fines. Faire chauffer un peu d’huile d’olive dans une poêle et y faire revenir le melon quelques minutes. Ajouter un peu de miel à la fin si le melon n’est pas très sucré.
Pendant ce temps, passer les tartines au four quelques minutes.
Disposer le melon dans les assiettes avec les tranches de bresaola. Ajouter les tartines. Verser un peu d’huile d’olive et servir.

19 commentaires:

  1. ton billet me fait mourir de rire, surtout van damme :-). J'adore ton humour, vraiment. koikes ton stage chiantissime sur l'assurance-vie? Et tu pars donc en apprentissage? Bonne résolution , si ça ne te plait pas, inutile de rester ;-)

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  2. je me suis taper une belle tranche de rire,j'en suis baba,le rire c'est mon assurance vie,je veillerai à pas acheter l'après shampooing que mêmes les stars elles te jalousent...et pis tous ces morts c'est glauque quand même,mais on rit quand même aux éclats!!!:)))

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  3. Et dire que je ne connaissais pas le Cookie Masque! Mea culpa, mais il n'est jamais trop tard pour bien faire.
    Quelle photos incroyables et allechantes - c'est tout simplement tout ce que j'aime.

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  4. Apprentie chez Angélina? Le début de la "starisation"(!), on dirait? Car effectivement, de belles créations et du beau monde en cuisine (hein, Guillemette?).Bravo, profites-en, "imbibe"-toi (bis), et n'oublie pas de nous en raconter un peu, tu fais ça tellement bien!

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  5. J'ai oublié l'essentiel: recettes magnifiques, on en reste baba (n'est pas Van Damme qui veut!!)

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  6. Au fait... c'est quoi l'eau levure ? Une coquille ? Pardonne à une plouk pâtissière si ce n'est pas le cas...

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  7. natalia : c'est bien une coquille, je corrige tout de suite.

    A part ça : mon stage, qui se termine d'ailleurs bientôt, n'est pas que sur l'assurance vie, mais sur les stratégies de marques et d'innovation en général ... Bref, le changement d'univers est pour bientôt, bep de pâtisserie, en apprentissage chez Angélina. Mais j'aurai l'occasion d'en reparler. En attendant, rions ;-)

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  8. Entre anecdotes loufoques, humour décadent et recettes irrésistibles, en 3 clics c'est réglé, tu atterris dans mon Netvibes! Ah oui puis j'oubliais... l'incontournable rubrique nécrologique, j'aime!

    Comme c'est bon de faire de telles découvertes, j'en suis toute émoustillée:-)

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  9. je suis super preneuse pour tes babas surprenants mais seulement une fois que je m'arrêterai de rire... c'est un plaisir...

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  10. Seras tu à Paris en juillet ou fin juin (rencontre troc livre date indéterminé voir blog )?
    Bravo pour la boulot, je suis moins convaincue par l'écosphère mais j'hallucine devant ton baba : il a dû super lever pour pouvoir remplir autant de petits moules.

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  11. Tiens ça me réconcilie avec le baba. Une fois comme ça moi j'ai réinventé la piadina, je te dis pas ce que j'étais fière.

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  12. Wow quel roman! Très agréable à lire en tout cas! J'ai bien ri :)
    J'adore les babas au rhum, et ceux-là sont vraiment beaux et très appétissants.
    Inutile peut-être, mais j'aime bien l'idée de l'écosphère que je ne connaissais pas.

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  13. Merci beaucoup pour ce blog que je ne connaissais pas, et qui est vraiment formidable ! J'aime beaucoup ton humour, et tes recettes, même si je ne sais pas cusiner.
    Je connais bien Limoges par contre, et je peux t'assurer que leur MacDo est moins huileux que Leroy Merlin. D'ailleurs, c'est vachement dangereux d'y faire des courses.
    J'ai déjà goûté des babas comme ça, chez une copine qui cuisine aussi un peu. Ils étaient franchement séduisants. Je ne suis pas sure que tu les fasses aussi bien, car ma copine est quand même vachement douée (elle va même aller en apprentissage chez Brad, à la rentrée). Mais les tiens ont l'air pas mal non plus, ceci dit.
    Ta nouvelle police est vraiment mieux, je trouve.
    Comme quoi pas besoin d'être expert pour innover. Ni distributeur pour distribuer.

    Attention à la marche, et gros bisous...
    ;)))

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  14. Que de nouvelles dans un seul post!
    Flo Bretzel

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  15. Je n'en ai pas perdu une goutte (de rhum) ni une miette (de baba). Je suis fan de ton esprit, ton humour, tes photos. Un vrai plaisir de venir chez toi ! Bravo pour Angelina, tu vas nous réinventer l'Africain peut-être avec une chantilly à ta façon ?

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  16. miss cookie, tu m'as demasquée chez Dorian!! ;)
    je te fais confiance pour apporter quelques unes de tes pépites chez Angelina... bravo!
    super baba du baba, celui de Monsieur Ducasse je l'ai dévoré ce midi lors d'une visite improvisée dans une de ses merveilleuses adresses... et décliné à ta façon, ça ne saurait tarder dans ma cuisine! xox

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  17. très belle ta photo de goutte d'eau, j'aime beaucoup

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  18. C'est ptet qu'une goutte d'eau, mais moi aussi je la trouve magnifique, fallait que je le dise!

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  19. Si je n'étais pas aussi coincée, je t'aurais déjà embrassée ;)
    Des lustres que les babas (avec lesquels j'aime bien aussi être imbibée) manquent à mon répertoire mais que je n'ai pas envie d'acheter les moules.. des lustres que j'ai comme la moitié de la planète les mêmes petits verres "suédois" que j'ai remisé dans un placard parce que chez moi, des contenants pour 1,5 cuillère à café de mousse au chocolat, non merci.. et là, c'est la révélation. Merciiiiiiii!!
    Et puis je découvre plein de points communs (bien sûr, je ne dévale pas les marches d'escalier sur les fesses mais il y a quelques jours, si!): moi aussi je revisite Ducasse à la baisse de sucre mais son grand livre "desserts et pâtisserie" est mon livre de chevet..
    Et moi aussi depuis 11 ans, je continue à entendre "tout ça pour ça" (bon courage!!!).
    bref, je vais revenir!!

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