samedi 5 mars 2011

OFF : de si riches Ailleurs



Pour sa sixième édition, le Omnivore Food Festival (OFF pour les intimes) a encore une fois dressé le portrait de la modernité culinaire en invitant une belle brochette de chefs, qu'ils soient connus, reconnus ou inconnus, qu'ils viennent de Paris, Moscou, Copenhague, Melbourne ou Järpen. Sur les deux scènes du centre international de Deauville se sont enchaînés trois jours de démos, d'émotions et d'éclats créatifs, accompagnés par les jolies présences de Luc Dubanchet, Sébastien Demorand et (notre chère) Clotilde Dusoulier.

De mes instants favoris se dégage un sens commun : une forme de simplicité dans l'approche, une élévation du banal par le geste, une pureté créative. D’où qu’ils viennent, les chefs se saisissent de leur terroir pour en extraire le sens. Tandis que l’imaginaire s’envole, le goût se concentre dans l’assiette, porté par la technique, sublimé par la main.


Rosio Sanchez, la pâtissière de Noma, nous éblouit par l'évidente cohérence de ses assiettes, la précision de ses accords et son incroyable créativité. La technique imparable de cette américaine, qui a passé quelques temps au WD-50, donne forme et sens aux produits rapportés du Danemark, ces ingrédients locaux souvent méconnus que vient rehausser une toute légère pointe sucrée, pour ne jamais plomber le mangeur, mais l’emmener jusqu’à l’ultime frontière du repas.


Des gestes, on se souviendra de Salvadore Tassa, frottant huile et réglisse entre ses mains pour délicatement masser les jeunes pousses de salade.
C’est aussi la main de Magnus Nilsson qui enfouit un minuscule oiseau (qu’il a lui même chassé au fin fond de sa Suède) sous les branchages de son domaine pour le cuire tout doucement, puis le servir avec une crème épaisse réduite jusqu’à la caramélisation.


L’attachement au sol, c’est enfin celui d’Alexandre Gauthier, qui construit avec l’architecte Patrick Bouchain la Grenouillère de demain, ancrée dans son marais et ouverte sur le jardin. Loin de son personnage « pertinent et impertinent », on retrouve le chef plein d’humilité, et presque serein malgré l’ampleur des travaux de son nouvel écrin (réouverture fin mars, début avril).

La cuisine se vit, se savoure, s’invente au quotidien. A l’heure où se multiplient les enthousiasmes éphémères et les jeux de dupes culinaires, on remercie encore une fois Omnivore de nous porter vers de si riches Ailleurs. 

à lire : "Autant de OFF que de cortex", émouvant texte de Luc Dubanchet

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